dimanche 30 octobre 2011

L'aveuglement à l'intégration des Maghrébins et des Africains


Encore une fois, la religion musulmane et les banlieues servent à se faire peur avec la gourmandise et les délices des spectateurs de films d'horreur à l'imagerie pourtant improbables. On peut s'étonner que les résultats de l'enquête Banlieue de la République portant sur 100 personnes soient repris sans aucune prudence et déclenche de telles réactions que révèlent les titres de ces tribunes : La fable de la mixité urbaine et L'Islam reste une menace [points de vue issus du dossier Islamisation des cités : mythe ou réalité ?].

Les auteurs de l'étude brouillent les cartes en reconnaissant eux-mêmes à la fois qu'elle n'est pas représentative de la population des deux communes de Seine-Saint-Denis mais posent "en postulat de départ que Clichy-Montfermeil, c'est la France même". De plus, les situations sociales exceptionnellement défavorables de ces villes et leurs forts taux d'immigrés non-européens les situent dans les cas extrêmes d'une région parisienne qui concentre à elle seule 40 % des immigrés de France. La revendication des auteurs de tirer des conclusions d'une agglomération idéale-typique (d'un modèle à partir du quel penser) est pertinente uniquement sur des communes aux situations extrêmes.

De fait, 75 % de la population de Clichy-sous-Bois, 30 % de la population de Montfermeil résident en un même quartier sensible à cheval sur ces deux villes et où 61 % des ménages sont non imposables. En aucun cas, il n'est possible d'extrapoler aux situations bien moins spectaculaires de la majorité des populations immigrées qui peuvent partager une même religion mais qui se distinguent par leurs caractéristiques sociales notamment par une intégration plus avancée dans le corps social français. En forçant le trait, cela reviendrait à penser les conditions de logement en France à partir des locataires d'HLM !

Prenons l'exemple de la soi-disante "sécession culturelle" affirmée dans la tribune de Christophe Guilluy, La fable de la mixité urbaine, suite à cette enquête, et qui renvoie à la ségrégation des immigrés non-européens sur nos territoires. Que nous disent les chiffres des recensements sur nos quartiers ? Entre 1968 et 1999 (il n'existe pas d'études plus récentes pour le moment), c'est bien une baisse de la ségrégation qui s'est opérée dans l'ombre pour les Maghrébins et les Africains sur l'ensemble du territoire français (Verdugo, 2011). Ce constat fort sérieux vient contrarier les représentations communes et demi-savantes d'une aggravation de la ségrégation au point que des ghettos se seraient formés en France.

Cette rhétorique a occulté l'incorporation sans bruit de la majorité des immigrés et la localisation de la majorité d'entre eux dans des quartiers populaires mais sans histoire. La fixation du regard sur la ségrégation "ethnique" contribue à ce que les immigrés soient vus et construits comme des problèmes dans la société française. Si le phénomène ségrégatif n'est pas à nier, il demeure que la dramaturgie de la "sécession des territoires" ne correspond pas à la situation française, ni d'ailleurs aux diverses situations des pays européens.

Même en Île-de-France où la présence immigrée est la plus importante sur le territoire national, la ségrégation a globalement baissé (Préteceille, 2009). Un cas extrême de ségrégation "ethnique" est relevé dans un unique quartier de cette région. Il est composé à plus de 70 % d'immigrés et situé... à Clichy-sous-Bois. L'étude dont sont tirés ces résultats précise qu'en 1999, il n'y avait en Île-de-France que 14 quartiers d'en moyenne 6 000 habitants chacun où les immigrés non-européens étaient majoritaires dans la population locale. Ils représentaient 4,8 % de cette population immigrée et 1,34 % de la population totale...

Mais hors des chiffres que l'on se reporte aux années 1960 : les immigrés vivaient dans des conditions aujourd'hui impensables, relégués loin des regards dans des bidonvilles aux portes de Paris, à Nanterre, à Gennevilliers, à Noisy-le-Grand... Ce progrès bien réel des conditions d'habitat des immigrés a été "masqué" par une plus grande acuité à l'immigration et aux rapports d'altérité. La bonne question à se poser est pourquoi cet intérêt épidermique en France, mais aussi en Europe, pour les problèmes touchant à l'immigration et la ségrégation des populations anciennement colonisées ?

En réalité, le modèle multiculturel d'intégration, qui prévalait jusque-là, a laissé place à un modèle basé sur le concept d'assimilation. Implicitement, les immigrés doivent abandonner les signes extérieurs de leur culture et de leur religion pour se fondre dans la culture dominante, dans l'ordre social établi, ordre qui est implicitement blanc et chrétien. D'aucuns remarquent que "les espaces musulmans, ancrés autour des mosquées etd'autres "institutions islamiques, sont lus par certains comme les symboles d'insularité et les sites possibles d'insurrection"(Philipps, 2006). L'impensé loge dans un imaginaire républicain blanc et chrétien qui s'accommode mal d'une diversité musulmane, ou perçue comme telle, devenue pathologique et audible après le 11-Septembre.


mardi 4 octobre 2011

Banlieues, islam : l'enquête qui dérange

AFP/PHILIPPE HUGUEN
Prière à la grande mosquée de Villeneuve-d'Ascq, en août.

Voilà un constat qui va déranger. Dans les tours de Clichy-sous-Bois et de Montfermeil (Seine-Saint-Denis), les deux villes emblématiques de la crise des banlieues depuis les émeutes de l'automne 2005, la République, ce principe collectif censé organiser la vie sociale, est un concept lointain. Ce qui "fait société" ? L'islam d'abord. Un islam du quotidien, familial, banal le plus souvent, qui fournit repères collectifs, morale individuelle, lien social, là où la République a multiplié les promesses sans les tenir.

La croyance religieuse plus structurante que la croyance républicaine, donc. Vingt-cinq ans après avoir publié une enquête référence sur la naissance de l'islam en France - intitulée Les Banlieues de l'islam (Seuil) -, le politologue Gilles Kepel, accompagné de cinq chercheurs, est retourné dans les cités populaires de Seine-Saint-Denis pour comprendre la crise des quartiers. Six ans après les émeutes causées par la mort de deux adolescents, en octobre 2005, son équipe a partagé le thé dans les appartements des deux villes, accompagné les mères de famille à la sortie des écoles, rencontré les chefs d'entreprise, les enseignants, les élus, pour raconter le destin de cette "Banlieue de la République" - c'est le titre de l'enquête, complexe et passionnante, publiée par l'Institut Montaigne.

Le sentiment de mise à l'écart a favorisé une "intensification" des pratiques religieuses, constate Gilles Kepel. Les indices en sont multiples. Une fréquentation des mosquées beaucoup plus régulière - les deux villes (60 000 habitants au total) comptent une dizaine de mosquées, aux profils extrêmement variés, pouvant accueillir jusqu'à 12 000 fidèles. Une pratique du ramadan presque systématique pour les hommes. Une conception extensible du halal, enfin, qui instaure une frontière morale entre ce qui est interdit et ce qui est autorisé, ligne de fracture valable pour les choix les plus intimes jusqu'à la vie sociale.

Les chercheurs prennent l'exemple des cantines scolaires, très peu fréquentées à Clichy en particulier. Un problème de coût évidemment pour les familles les plus pauvres. Mais la raison fondamentale tient au respect du halal. Les premières générations d'immigrés y avaient inscrit leurs enfants, leur demandant simplement de ne pas manger de porc. Une partie de leurs enfants, devenus parents à leur tour, préfère éviter les cantines pour leur propre descendance parce que celles-ci ne proposent pas de halal. Un facteur d'éloignement préoccupant pour Gilles Kepel :"Apprendre à manger, ensemble, à la table de l'école est l'un des modes d'apprentissage de la convivialité future à la table de la République."

Car le mouvement de "réislamisation culturelle" de la fin des années 1990 a été particulièrement marqué à Clichy et à Montfermeil. Sur les ruines causées par les trafics de drogue dure, dans un contexte d'effondrement du communisme municipal, face à la multiplication des incivilités et des violences, les missionnaires du Tabligh (le plus important mouvement piétiste de l'islam), en particulier, ont contribué à redonner un cadre collectif. Et participé à la lutte contre l'héroïne, dans les années 1990, là où la police avait échoué. Ce combat contre les drogues dures - remplacées en partie par les trafics de cannabis - a offert une "légitimité sociale, spirituelle et rédemptrice" à l'islam - même si la victoire contre l'héroïne est, en réalité, largement venue des politiques sanitaires.

L'islam a aussi et surtout fourni une "compensation" au sentiment d'indignité sociale, politique et économique. C'est la thèse centrale de Gilles Kepel, convaincu que cette "piété exacerbée" est un symptôme de la crise des banlieues, pas sa cause. Comme si l'islam s'était développé en l'absence de la République, plus qu'en opposition. Comme si les valeurs de l'islam avaient rempli le vide laissé par les valeurs républicaines. Comment croire encore, en effet, en la République ? Plus qu'une recherche sur l'islam, l'étude de Gilles Kepel est une plongée dans les interstices et les failles des politiques publiques en direction des quartiers sensibles... Avec un bilan médiocre : le territoire souffre toujours d'une mise à l'écart durable, illustrée ces dernières semaines par l'épidémie de tuberculose, maladie d'un autre siècle, dans le quartier du Chêne-Pointu, à Clichy, ghetto de pauvres et d'immigrés face auquel les pouvoirs publics restent désarmés (Le Monde du 29 septembre). Illustrée depuis des années par un taux de chômage très élevé, un niveau de pauvreté sans équivalent en Ile-de-France et un échec scolaire massif.

Clichy-Montfermeil forme une société fragile, fragmentée, déstructurée. Où l'on compte des réussites individuelles parfois brillantes et des parcours de résilience exemplaires, mais où l'échec scolaire et l'orientation précoce vers l'enseignement professionnel sont la norme."Porteuse d'espoirs immenses, l'école est pourtant aussi l'objet des ressentiments les plus profonds", constatent les chercheurs. Au point que "la figure la plus détestée par bon nombre de jeunes est celle de la conseillère d'orientation à la fin du collège - loin devant les policiers".

Et pourtant, les pouvoirs publics n'ont pas ménagé leurs efforts. Des centaines de millions d'euros investis dans la rénovation urbaine pour détruire les tours les plus anciennes et reconstruire des quartiers entiers. Depuis deux ans, les grues ont poussé un peu partout et les chantiers se sont multipliés - invalidant les discours trop faciles sur l'abandon de l'Etat. Ici, une école reconstruite, là, un immeuble dégradé transformé en résidence. Un commissariat neuf, aussi, dont la construction a été plébiscitée par les habitants - parce qu'il incarnait l'espoir d'une politique de sécurité de proximité.

Le problème, montre Gilles Kepel, c'est que l'Etat bâtisseur ne suffit pas. Les tours ont été rasées pour certaines, rénovées pour d'autres, mais l'Etat social, lui, reste insuffisant. La politique de l'emploi, incohérente, ne permet pas de raccrocher les wagons de chômeurs. Les transports publics restent notoirement insuffisants et empêchent la jeunesse des deux villes de profiter de la dynamique économique du reste de la Seine-Saint-Denis. Plus délicat encore, la prise en charge des jeunes enfants n'est pas adaptée, en particulier pour les familles débarquant d'Afrique subsaharienne et élevés avec des modèles culturels très éloignés des pratiques occidentales.

Que faire alors ? Réorienter les politiques publiques vers l'éducation, la petite enfance, d'abord, pour donner à la jeunesse de quoi s'intégrer économiquement et socialement. Faire confiance, ensuite, aux élites locales de la diversité en leur permettant d'accéder aux responsabilités pour avoir, demain, des maires, des députés, des hauts fonctionnaires musulmans et républicains. Car, dans ce tableau sombre, le chercheur perçoit l'éveil d'une classe moyenne, de chefs d'entreprise, de jeunes diplômés, de militants associatifs, désireuse de peser dans la vie publique, soucieuse de concilier identité musulmane et appartenance républicaine.

lundi 3 octobre 2011

Grandes écoles et filières d'excellence : pourquoi pas pour tous ?



ESSEC/ALEXIS CHEZIERE
L'Essec a été à l'initiative du programme "Une grande école, pourquoi pas moi?"

"En France, l'inéquité du système éducatif est dramatique." Bernard Hugonnier, directeur adjoint à la direction de l'éducation de l'OCDE, n'y va pas de main morte en présentant début septembre les résultats de l'enquête annuelle que mène l'organisation internationale sur l'éducation. "Sur 34 pays de l'OCDE, la France se classe à l'avant-dernière place. Le déterminisme social est extraordinairement fort en France, notre système éducatif ne s'améliore pas et ceux qui en pâtissent le plus, ce sont les pauvres", résumait-il.

DONNER DE L'AMBITION ET DES MOYENS

En lançant en 2001 le programme "Une grande école pourquoi pas moi ?", l'Essec, l'une des plus grandes écoles de management françaises, voulait justement aider des jeunes des quartiers défavorisés à accéder à un avenir d'excellence. Dans le cadre de ce programme, des tuteurs issus des grandes écoles suivent des élèves pendant plusieurs années pour leur apporter un bagage culturel autant que de la confiance en eux.

Aujourd'hui, ils sont près de 10 000 dans toute la France à avoir bénéficié d'un programme qui s'est imposé dans plus de 80 grandes écoles. "Il n'y pas de déterminisme social ni de fatalité des parcours scolaires pour peu qu'on s'intéresse de près à des jeunes qui ont 12/13 de moyenne et auquel on peut donner accès à un parcours d'excellence quand ils se destinaient juste à un BEP métiers de la comptabilité", insiste Fabrice Hervieu-Wane, l'un des trois auteurs du livre "Une grande école pourquoi pas moi ? Le droit au mérite" (éditions Armand Colin).

OBJECTIF : UNE VOIE D'EXCELLENCE

Même réflexion du côté des IEP (instituts d'études politiques) et tout particulièrement de celui de Lille dont étudiants et professeurs soutiennent chaque année 800 élèves de la 3ème à la terminale."Il faut commencer très tôt pour aider de bons profils à se diriger vers une seconde générale en leur faisant prendre conscience de leurs capacités à se lancer dans des études longues, commente Pierre Mathiot, son directeur.Ensuite, au lycée, nous allons peu à peu vers une logique de préparation de notre concours mais aussi des autres voies d'excellence."

Intitulée "programme d'études intégrées" (PEI), l'initiative des IEP se veut en effet d'abord un soutien pour accéder à l'enseignement supérieur dans les meilleures conditions. "20% de ceux qui le préparent intègrent finalement un IEP, contre 14% pour l'ensemble des candidats,reprend Pierre Mathiot. C'est donc satisfaisant mais ce qui l'est au moins autant ce sont tous ceux qui nous remercient de les avoir aidés à obtenir une mention très bien ou bien au bac."

IEP DE LILLE
Pierre Mathiot, directeur de Sciences Po Lille, travaille comme son "grand frère parisien", à accroître la diversité de son recrutement.

L'EXEMPLE DE SCIENCES PO PARIS

A côté de ces programmes d'aide aux élèves venus de quartiers difficiles, Sciences Po Paris a créé il y a maintenant dix ans ses "conventions éducation prioritaires". Souvent appelées"conventions ZEP", elles permettent à des jeunes d'intégrer Sciences Po Paris dans des conditions spécifiques. Aujourd'hui près d'un élève sur 10 reçu en première année passe par le prisme de 85 lycées disséminés dans toute la France.

La grande satisfaction de l'institut de la rue Saint-Guillaume est de constater qu'une fois diplômés ces étudiants s'intègrent très bien sur le marché du travail. "Leurs salaires sont même en moyenne un peu supérieurs à ceux de l'ensemble des diplômés de Sciences Po !", se félicite Richard Descoings, son directeur. Il est vrai qu'ils sont plus attirés par les entreprises que la moyenne des diplômés. Un motif de surprise pour l'emblématique directeur :"Je croyais qu'ils chercheraient la sécurité de l'emploi et en fait pas du tout".

"Nous n'avons eu aucun problème d'insertion", se félicitent en tout cas les premiers étudiants diplômés, fiers de pouvoir dire qu'ils travaillent dans de grandes entreprises internationales. Et reconnaissants à Sciences Po comme à leur lycée. "Nos profs ont fait un gros travail pour nous convaincre que nous avions les capacités pour intégrer Sciences Po. Ils avaient raison", témoigne Miloud Boudjemai, aujourd'hui analyste financier à Londres.

UNE INÉGALITÉ QUI REMONTE LOIN

"Il fait faire en sorte que la diversité soir une chance pour la France et la France une chance pour la diversité", commente Pap' Amadou Ngom, vice président du club XXIème siècle et promoteur des "Entretiens de l'excellence", qui insiste : "Le modèle français ne marche pas si mal que ça. Ce n'était pas non plus facile pour les Polonais ou les Espagnols de s'intégrer dans les siècles précédents. Pour autant, il ne faut pas négliger le problème qu'ont les familles modestes à avoir accès à l'enseignement supérieur".

Car, comme le rappelle un rapport sénatorial de 2007 "les grandes écoles et les classes préparatoires ne sont pas un "îlot" d'inégalité sociale dans un paysage éducatif parfaitement démocratique : elles arrivent en fin d'un processus de "tri social" qui agit et se renforce tout au long du parcours scolaire, de la maternelle à l'accès au baccalauréat".

Un "tri social" qui touche bien évidemment les populations modestes. Sans différences liées à l'origine car, comme le soulignent les auteurs d'" Une grande école pourquoi pas moi ? Le droit au mérite", "à milieu social égal, les résultats des enfants d'origines étrangères ou immigrées sont les mêmes que les autres".

AFP/ERIC ESTRADE
Juste derrière les grandes écoles de management, les études de médecine sont celles qui sont le moins ouvertes aux jeunes issus de catégories sociales modestes.

COMMENT DONNER DES CHANCES ÉGALES À TOUS ?

La création des "Entretiens de l'excellence" répond au besoin d'information des familles les plus modestes. "Nous accueillons chaque année 6000 jeunes de la 3ème au bac dans des lieux d'études prestigieux, comme Sciences Po à Paris ou la fac de médecine de Marseille, pour leur présenter des filières dans lesquelles ils n'oseraient pas d'eux-mêmes s'orienter", explique Pap' Amadou Ngom.

Quoi de commun effectivement entre cet élève d'une famille bourgeoise ou d'enseignants "materné" depuis tout petit et cet enfant de banlieue élevé par une famille peu informée qui ne bénéficie pas de sa propre chambre pour travailler ? A ce dernier il faut une volonté souvent herculéenne pour s'imposer."Quand les parents accompagnent les jeunes aux entretiens, on sait que la moitié du chemin est déjà faite,remarque Pap' Amadou Ngom.Ensuite, nos volontaires tuteurs vont accompagner ces jeunes tout au long de leur parcours pour les conseiller et raviver chez eux la flamme des études. Il ne faut pas que quelqu'un puisse se dire un jour "si je l'avais su, je l'aurais fait" ! "

APPORTER LES CODES SOCIAUX

Une démarche semblable à celle de l'association Passeport Avenirqui elle s'attache d'abord à aider les élèves des classes préparatoires technologiques ou ATS (post BTS ou DUT) à intégrer les meilleures grandes écoles. "Nos tuteurs sont là pour parler de la réalité des métiers aux élèves, les aider à décrocher des stages ou bien encore les préparer aux entretiens des concours, pas pour leur donner des cours", insiste Benjamin Blavier, son délégué général.

Et les cadres de France Telecom, SFR ou encore Accenture ou Capgemini sont très nombreux à être volontaires pour assurer ce tutorat. "Ils ont souvent eux-mêmes bénéficié dans leur parcours d'une rencontre qui ont changé leur vie et entendent rendre la pareille", reprend Benjamin Blavier.

Les jeunes qui bénéficieront de ce tutorat sont sélectionnés par les établissements partenaires. "Ils doivent être boursiers, issus de quartiers populaires et de l'immigration", résume le délégué général, dont l'association donne également des cours collectifs dans les classes prépas et les grandes écoles partenaires: "Nous nous focalisons aujourd'hui sur elles car elles représentent l'excellence mais nous pensons également bientôt nous rapprocher d'universités."

PARRAINER UN JEUNE

Avec l'association Actenses, son président, David Vaillant va encore plus loin : "Nous voulons accompagner les lycéens dans leurs choix d'orientation quels qu'ils soient : du BTS à l'école d'ingénieurs ou Sciences Po nous ne voulons privilégier aucun choix". Tout comme Passeport Avenir, Actenses privilégie l'accompagnement des élèves par des professionnels. "De la seconde à la terminale, nous demandons à nos parrains d'aider les jeunes à se poser les bonnes questions sur leur avenir."

Un engagement de 3 à 4 journées par an qui comprend des rencontres au sein du lycée sur la découverte du monde de l'entreprise et la préparation à la vie étudiante. S'ajoute à ce programme, une sortie culturelle et pédagogique qui est proposée une fois par mois. "Il faut que s'établisse une vraie complicité entre le parrain et le filleul pour qu'ils se rencontrent et communiquent régulièrement sur le projet professionnel du jeune", explique encore David Vaillant, qui espère bien que son dispositif, encore expérimental en Ile-de-France essentiellement, "se généralise afin que la société civile se pose en soutien de l'Education nationale".

LES SUIVRE DANS L'ENTREPRISE

Mais toutes ces actions sont de peu de poids si ces jeunes diplômés issus de la diversité ne réussissent pas ensuite des parcours d'excellence dans l'entreprise. "C'est clair que quand on a un nom à consonance étrangère votre CV n'est pas forcément en haut de la pile dans certaines entreprises, remarque Pap' Amadou Ngom. Mais au-delà de cela il y a aussi des codes à connaître et nous aidons nos tutorés à préparer leurs entretiens d'embauche ou à travailler leur CV."

"Même après cinq années d'écoles et de prépas, il faut encore aider beaucoup de candidats à se présenter et à présenter leur projet professionnel, confirme Benjamin Blavier. Ensuite, ils ont de formidables atouts avec leur diplôme de grande école, leur multiculturalisme et les réseaux qu'ils se sont constitués. " Et Pap' Amadou Ngom de conclure, optimiste : "Dans les secteurs qui recrutent, comme l'informatique, il y a bien longtemps qu'on ne regarde que les compétences, pas la couleur de peau !"