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mardi 27 novembre 2012

La demande de récusation d'un magistrat juif rejetée 27.11.12 | 22:36 | Le Monde.fr avec AFP et Reuters

Me Alexis Dubruel avait déposé sa requête sur la base de l'article 668 du Code de procédure pénal, qui permet de récuser un juge s'il est suspecté d'impartialité. AFP/DAMIEN MEYER

Le premier président de la cour d'appel de Lyon a rejeté mardi 27 novembre la demande de récusation présentée par un avocat à l'encontre du juge Albert Lévy, qu'il soupçonne de partialité du fait de son patronyme à consonance juive.

Me Alexis Dubruel avait déposé sa requête le 31 octobre sur la base de l'article 668 du Code de procédure pénal, qui permet de récuser un juge s'il est suspecté d'impartialité. Il avait fait valoir dans une affaire familiale tout à fait banale que le père de la prévenue était également juif, car se prénommant Moïse, une démarche qui a suscité la réprobation de nombreux magistrats. Me Dubruel, qui défendait la partie civile, a cité dans sa requête des définitions des noms données par l'encyclopédie en ligne Wikipédia.

Selon cet avocat, le juge manquerait d'impartialité dans un dossier où le père de la prévenue s'appelle Moïse."Le 'papa' de la personne (...) se prénomme Moïse", et "la première page de la notice du mot 'Moïse' sur le site Wikipédia mentionne que ce mot 'est selon la tradition, le fondateur de la religion juive'", écrit Me Dubruel.
Or, "la première page de la notice du mot 'Levy' sur Wikipédia mentionne que ce mot 'est, dans le peuple juif, un des noms portés par les descendants des lévites'", ajoute l'avocat, concluant que "la matérialité de ces constatations n'est pas contestable."

UNE DÉMARCHE "JURIDIQUEMENT DÉLIRANTE"

Albert Lévy, 61 ans, a déjà fait l'objet dans le passé d'attaques antisémites, venant en particulier de l'extrême droite. Au printemps, le groupe islamiste Forsane Alizza avait projeté son enlèvement. Ce premier vice-président du tribunal de grande instance de Lyon avait alors été placé sous protection policière. La requête a été rejetée mardi et la cliente de l'avocat a été condamnée de ce fait à une amende civile de 750 euros, soit la plus importante prévue dans ce cas. Maître Alain Jakubowicz, avocat d'Albert Lévy, mais également président de la Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme (Licra), s'est félicité de la décision du tribunal.

"Cette affaire dépasse le cas d'Albert Lévy et atteint les fondements même de l'institution. Ces attaques ignobles contre Albert Lévy sont la pire chose qu'on puisse dire à l'encontre d'un magistrat", a-t-il indiqué. Alain Jakubowicz a estimé que la démarche de son confrère était une dérive dangereuse. "Demain, on pourrait ainsi récuser un juge pour ses orientations sexuelles, pour ses appartenances politiques, parce qu'il est noir, banc, chrétien, ou franc-maçon... C'est absolument effroyable", a-t-il dit.

Le Syndicat de la magistrature a estimé dans un communiqué que la démarche était "juridiquement délirante""humainement inacceptable" et qu'elle tendait à promouvoir une conception fondamentalement viciée et dangereuse du devoir d'impartialité qui s'impose à tout magistrat. Le Parquet général de Lyon a annoncé à qu'il engageait une procésure disciplinaire contre l'avocat.

La garde des Sceaux, Christiane Taubira, a pour sa part exprimé dans un communiqué sa " plus vive réprobation à l'égard de toute mise en cause de l'impartialité d'un magistrat dans l'exercice de ses fonctions du fait de ses origines, de son patronyme, ou de son appartenance ou sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, ou une religion déterminée", rappelant "les dispositions de l'article 225-1 du Code pénal définissant la discrimination".
Mme Taubira a indiqué qu'elle apportait "son plein soutien au magistrat concerné", assurant "les autorités judiciaires de Lyon de tout son engagement pour la mise en oeuvre des mesures de protection statutaire (...) relative au statut de la magistrature".


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