LEMONDE.FR | 26.05.11
Début 2011, l'UMP attaquait ainsi par une convention sur la justice, quelques semaines après la polémique provoquée par les propos du président Sarkozy sur les défaillances de la justice dans l'affaire du meurtre de Laetitia, à Pornic. Début avril, le parti évoquait la laïcité lors d'une convention en forme de conclusion au sulfureux débat lancé sur le sujet. Puis ce fut l'emploi, début mai. Le 14 juin, un nouveau rendez-vous se penchera à la ruralité.Le secrétaire général de l'UMP, Jean-François Copé, a annoncé mardi 24 mai, que le parti présidentiel tiendrait, le 28 juin, une nouvelle convention thématique, consacrée à l'immigration. A l'instar de celles sur la justice, la laïcité ou l'emploi, ces réunions doivent servir de socle au futur programme de l'UMP pour 2012, et de son très probable candidat, Nicolas Sarkozy.
Selon l'UMP, contactée par Le Monde.fr, la convention du 28 juin devait initialement évoquer... le numérique. Elle sera finalement tournée vers l'immigration. Un sujet sur lequel la majorité semble opérer, depuis quelques semaines, un virage à droite et rompre avec le concept d'"immigration choisie" que prônait Nicolas Sarkozy.
CLAUDE GUÉANT À L'OFFENSIVE
A la manœuvre, Claude Guéant, ministre de l'intérieur, multiplie les sorties sur la nécessité de réduire l'immigration légale en France. Dimanche 22 mai, invité du Grand Rendez-vous Europe 1/Le Parisien, il a ainsi estimé que la France n'avait"pas besoin de maçons" immigrés car elle disposait de la "ressource nécessaire". Une déclaration qui lui a valu un tollé à gauche.
Mardi 24 mai, le porte-parole du gouvernement, François Baroin, a soutenu le ministre de l'intérieur, jugeant qu'il avait fait "un constat de bon sens". Pour le ministre du budget, "avant même de traiter la question du chômage, nous avons 100 000 personnes actives à absorber au titre de l'économie" et "naturellement, nous n'avons pas besoin d'une économie d'importation et donc d'une immigration économique" dans les métiers du bâtiment.
L'immigration économique, liée au travail, est évaluée à environ 20 000 personnes par an. Les professionnels des secteurs comme le bâtiment ou la restauration estiment généralement que cet afflux de travailleurs étrangers est nécessaire pour occuper des emplois à bas coût. Selon une récente étude de Pôle emploi, 37,6% des embauches projetées par les employeurs dans les secteurs de la restauration ou des services à la personne connaissent des difficultés de recrutement.
Au cours de la même émission, Claude Guéant a également jugé que "l'intégration ne va pas si bien que ça : le quart des étrangers qui ne sont pas d'origine européenne sont au chômage. Les deux tiers des échecs scolaires, c'est l'échec d'enfants d'immigrés". Les propos du ministre de l'intérieur ont provoqué l'indignation des associations de parents d'élèves. Face à celle-ci, Claude Guéant s'est dit mardi "étonné", jugeant "que [ses] propos sont tout le contraire d'une stigmatisation, mais le constat de difficultés dans notre politique d'intégration".
JEAN-FRANÇOIS COPÉ ET "L'IMMIGRATION SOCIALE"
Avec sa convention, l'UMP a décidé de poursuivre dans la voie de la stigmatisation de l'immigration. Et de donner une suite à l'initiative du ministre des affaires européennes Laurent Wauquiez qui, dans une charge contre le revenu de solidarité active (RSA) début mai, proposait de limiter l'accès des étrangers aux minima sociaux. Pour introduire son débat, Jean-François Copé a ainsi évoqué "la question de l'immigration non pas économique mais sociale". "Ça n'a rien à voir avec la xénophobie, c'est un problème comptable (...). Il y a un certain nombre de mesures à caractère social dont peuvent bénéficier les immigrés" que "nous ne pouvons pas financer", a-t-il lancé.
Le terme d'"immigration sociale", déjà employé par le même M. Copé fin avril, vise ici une immigration qui s'effectuerait dans le but de bénéficier des prestations sociales offertes par le pays d'accueil - une thèse par ailleurs réfutée par la plupart des spécialistes de la question. Ce thème était jusqu'ici plutôt utilisé par l'extrême-droite. Jean-Marie Le Pen parlait ainsi dans un discours, le 12 mars, de "95% d'immigration sociale".
Ce nouveau "débat" sur l'immigration arrive à point nommé pour calmer quelque peu la grogne des élus les plus à droite de l'UMP, regroupés au sein du collectif Droite populaire. Ces derniers sont à la pointe de la guerilla des parlementaires de la majorité contre la proposition gouvernementale de faire disparaître les panneaux avertisseurs de radars.
L'ancien porte-parole de l'UMP, Dominique Paillé, président de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (Ofii) et vice-président du Parti radical de Jean-Louis Borloo, a appelé le parti présidentiel à "se garder de toute dérive populiste" et à "ne pas donner l'impression d'aboyer avec les loups". Il a par ailleurs refusé de commenter les propos de Claude Guéant.
Le Monde.fr
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