Dans les rangs socialistes, avant mai 2012, on l'appelait « le majordome » ou « le couteau suisse » de François Hollande. Un signe de l'importance fonctionnelle qu'avait prise Faouzi Lamdaoui, poussé à la démission mercredi 3 décembre après avoir été cité à comparaître dans une affaire d'abus de bien social, dans le dispositif politique de celui qui n'était pas encore président de la République.
Le conseiller à l'égalité et à la diversité du chef de l'Etat a démontré, des années durant, un dévouement de tous les instants et une capacité à se rendre à la fois indispensable et discret à François Hollande. Et avoir fait partie, comme il se plaisait à le rappeler, de « ceux qui n'ont jamais douté », à une époque où personne, ou presque, n'y croyait.
Qui est Faouzi Lamdaoui ? Dans les rangs socialistes, beaucoup demeurent perplexes, qui l'ont vu débarquer au mitan des années 2000 dans la garde rapprochée de celui qui était alors premier secrétaire.« Quand je suis rentré au PS en 1992, j'ai découvert le monde politique : que des blancs. Ça m'a confirmé que le combat passait par là », expliquait alors M. Lamdaoui, originaire de la ville algérienne de Constantine et qui, côté cursus, fait état d'« études d'ingénieur logisticien » et d'un parcours dans le privé.
« C'est un OVNI »
C'est sur cette thématique de la « diversité » qu'il rencontre François Hollande, en 2002. Celui-ci, flairant là un créneau politiquement porteur, le promeut dans les instances socialistes avec d'autres, comme Kader Arif, ex-secrétaire d'Etat aux anciens combattants récemment démissionné pour indélicatesses familiales, ou l'ancien président de SOS Racisme, Malek Boutih. En 2005, M. Lamdaoui était devenu secrétaire national du PS chargé de l'égalité des chances.
Sa participation aux joutes idéologiques de la rue de Solférino demeure néanmoins limitée : pas un camarade ne se souvient de la moindre prise de parole de sa part dans une des instances du parti. « Il est au secrétariat national, dans les couloirs, dans le bureau de François, il l'accompagne partout et il est très présent, mais ne dit pas un mot, se rappelle un dirigeant socialiste.Il n'est le produit d'aucune histoire, ni les trotskystes, ni les fabiusiens, ni les rocardiens. C'est un OVNI. » Juste un fidèle parmi les fidèles.
Aux lendemains du congrès de Reims, en 2008, M. Lamdaoui fait partie de ceux, rares, qui croient toujours en M. Hollande et se réunissent dans son bureau de l'Assemblée nationale, le mardi. « C'est difficile. Il faut résister à tous les coups, tout faire, tout gérer, alors qu'on est très peu », confie alors celui qui convoie partout en France le député de la Corrèze dans sa Volkswagen Golf noire personnelle, va chercher ses costumes au pressing et vante auprès de la presse le nouveau look de son champion. Un dévouement qui n'a pas toujours été récompensé à la hauteur de ses espérances.
« Ses rapports avec le président se sont distendus »
Certes, en 2007, M. Hollande lui avait obtenu l'investiture aux législatives à Argenteuil (Val-d'Oise), où il échouera de 300 voix. Elu ensuite au conseil municipal de la ville, adjoint de Philippe Doucet, il s'était d'ailleurs durement affronté avec ce dernier. Mais M. Hollande, une fois installé à l'Elysée, ne l'avait intégré dans son équipe qu'au titre de conseiller diversité, alors que M. Lamdaoui, chef de cabinet du candidat pendant la campagne présidentielle, caressait l'espoir d'occuper la même fonction auprès du chef de l'Etat voire d'entrer au gouvernement.
M. Hollande, de même, n'avait pas levé le petit doigt pour le soutenir, en novembre 2011, alors qu'il lorgnait sur l'investiture aux législatives dans la 9e circonscription des Français de l'étranger, finalement dévolue à l'aubryste Pouria Amirshahi. M. Lamdaoui en avait conçu une grande amertume, alors vivement exprimée sur Twitter : « Que vaut l'homme politique sans le sens de la parole donnée ? Le vrai leader doit respecter ses engagements en particulier envers ses compagnons historiques. »
A l'Elysée, M. Lamdaoui « a auditionné pas mal de gens, tenté de trouver des profils issus de la diversité pour des nominations au tour extérieur et travaillé sur la lutte contre les discriminations », résume un conseiller du président. Ayant fait état de menaces de mort contre sa personne, M. Lamdaoui s'était vu attribuer une protection policière, qui, selon Charlie Hebdo, lui avait été retirée après qu'il eut demandé à un fonctionnaire d'aller quérir pour lui un pain au chocolat.« Ses rapports avec le président se sont distendus, et il en est très malheureux », poursuit ce conseiller. M. Lamdaoui, de longue date, craignait de tomber en disgrâce au palais.
Mercredi, il n'a eu aucun contact avec François Hollande avant d'annoncer sa démission. L'Elysée a publié un communiqué prenant acte de son départ. « Faouzi Lamdaoui a présenté sa démission pour se donner les moyens de se défendre suite à sa citation pour des faits remontant à 2007-2008 », a expliqué le palais présidentiel.
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