samedi 28 mars 2015

Une femme voilée enceinte agressée à Toulouse LE FIGARO Publié le 28/03/2015 à 18:34 Selon son témoignage, elle aurait été prise à partie mardi à cause de son voile. Deux suspects sont en fuite. Le premier ministre Manuel Valls a fait part de son «indignation».


Selon son témoignage, elle aurait été prise à partie mardi à cause de son voile. Deux suspects sont en fuite. Le premier ministre Manuel Valls a fait part de son «indignation».

C'est son mari qui se fait son porte-parole. «Pour la protéger», selon lui, après ce «grand traumatisme physique et psychologique». Khedija, son épouse, aurait été agressée à Toulouse en début de semaine à cause de son voile islamique, et ne devrait son salut qu'à l'enfant qu'elle porte. Le premier ministre Manuel Valls a fait part de son «indignation». «Ce n'est pas cela la France», écrit-il dans un message sur Twitter.

Le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve a condamné un acte «particulièrement choquant».

Le faits se seraient déroulés mardi 24 mars, peu avant 9 heures dans le quartier de la Roseraie. Khedija vient de déposer ses enfants à l'école. C'est alors que, selon le récit de son mari, elle aurait été agressée par deux hommes d'une vingtaine d'années. L'un d'eux lui aurait agrippé les cheveux et tiré sur son voile en lui disant: «Pas de cela chez nous!» Le mari précise qu'il s'agissait d'un «jeune européen». Ce dernier l'aurait alors frappée avant de sortir un couteau. C'est alors que son compagnon, jusque-là inactif, aurait remarqué que Khedija était enceinte et aurait tenté de maîtriser les ardeurs de l'agresseur. Les deux hommes se seraient ensuite enfuis. De quoi permettre au mari d'affirmer que «c'est le bébé qui n'est pas encore né qui a sauvé [sa] femme». Aucun témoin n'a vu les faits.

Khedija a été hospitalisée dans une clinique toulousaine. «Le bébé n'a rien mais ma femme a mal partout, précise le mari. Elle a pris beaucoup de coups. Psychologiquement, c'est très dur. Elle n'arrête plus de pleurer», affirme-t-il.

La classe politique condamne

Le couple, de nationalité française, a déposé plainte pour agression à caractère raciste. «Il n'y a pas de raison de mettre en doute sa parole», précise une source policière, évoquant la possibilité de faire un portrait-robot de l'agresseur qui a pris la fuite.

L'agression a été révélée dans la presse jeudi et a entraîné ensuite de nombreuses réactions, notamment celle du ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve qui a dénoncé un acte «particulièrement choquant». «En faisant de la lutte contre le racisme et l'antisémitisme une grande cause nationale, le gouvernement fait en sorte qu'aucun Français ne puisse être attaqué ni menacé en raison de son origine ou de sa religion. Il en va de la préservation de la cohésion nationale et du respect des principes fondateurs de la République.»

Le maire de Toulouse, Jean-Luc Moudenc, a tardé à réagir, mais acondamné cette agression auprès du Monde .«Dans un climat tellement électrique, nous avons besoin d'apaisement, explique-t-il. Et, à la veille des élections, je ne veux pas entrer dans une sorte d'instrumentalisation de tels évènements.»

vendredi 27 mars 2015

​​ Le repas végétarien, le plus laïc de tous LE MONDE | 26.03.2015 à 15h15 • Le Monde mis à jour le 27.03.2015


Le débat sur la laïcité et le « vivre ensemble » a donc fait irruption dans nos assiettes. A en croire certains, il y aurait une façon « française et républicaine » de manger. Au nom de cette laïcité culinaire, Gilles Platret, le maire UMP de Chalon-sur-Saône (Saône-et-Loire), a annoncé, le 16 mars, qu'il mettra fin au menu de substitution dans les cantines scolaires de sa ville dès la prochaine rentrée.

Depuis plus de trente ans pourtant, dans cette ville comme dans d'autres, des menus alternatifs étaient proposés aux plats contenant du porc. Sans poser de problème. Mais, à Chalon-sur-Saône, les enfants seront priés de manger « comme tout le monde » ou d'aller manger ailleurs. « Si vous voulez que vos enfants aient des habitudes alimentaires confessionnelles, vous allez dans l'enseignement privé confessionnel », a aussitôt soutenu Nicolas Sarkozy.

Cette prise de position du président de l'UMP a étonné et choqué jusque parmi ses proches. Comment dénoncer la communautarisation de certains Français musulmans, et inviter ces mêmes musulmans à quitter les écoles publiques pour des établissements confessionnels ? L'instrumentalisation du dossier des cantines en vue de séduire les électeurs du Front national est trop grossière pour être convaincante.

Le principe laïc n'implique nullement d'imposer un menu unique aux enfants, au mépris des différences et des préférences individuelles. Il faut dépasser ce faux débat : plutôt que d'utiliser le porc ou la laïcité pour attiser la haine confessionnelle et diviser les Français, nous proposons l'instauration dans les cantines scolaires d'une alternative végétarienne à tous les repas.

 

Satisfaire les végétaliens

Loin d'être dogmatique, notre proposition est avant tout pragmatique : le repas végétarien convient au plus grand nombre – musulmans, juifs, chrétiens, athées ou autres. Pour être juste, il conviendrait que cette alternative sans viande et sans poisson exclut le lait et les œufs, afin de satisfaire les végétaliens.

Le plat végétarien, et à plus forte raison végétalien, est une solution laïque et œcuménique aux préférences alimentaires de chacun, qui a le mérite de représenter l'alternative la plus simple pour les collectivités locales qui ne peuvent satisfaire des contraintes et des préférences alimentaires multiples. Le repas végétarien réunit tout le monde.

Loin des considérations religieuses, il répond aux convictions de tous ceux qui refusent de manger des animaux pour des raisons éthiques, par souci du bien-être animal et respect de la vie sensible. Pourquoi forcer leurs enfants à manger de la viande ou du poisson à l'école ?

Laisser le choix aux enfants est tout ce que nous demandons : ne pas les empêcher de manger de la viande s'ils le souhaitent, mais leur permettre de ne pas le faire. L'alternative n'enlève rien aux non-végétariens, tandis que le menu unique ôte à ceux qui ne mangent pas de viande, ou qui refusent le porc, le droit d'avoir un repas équilibré, qu'ils ont payé comme les autres. C'est discriminatoire et injuste.

En France, ni la loi du 27 juillet 2010 dite loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche, ni le décret ou l'arrêté du 30 septembre 2011 dits relatifs à la qualité nutritionnelle des repas servis dans le cadre de la restauration scolaire ne mentionnent l'alternative végétarienne. Pis, l'Etat entend faire croire que toutes les sources de protéines ne seraient qu'animales. Or la France semble la seule en Europe. Dans aucun autre Etat membre il n'y a de loi ou de décret ayant une portée contraignante où le régime carné est tant sacralisé.

 

Multiples bienfaits

L'alternative végétarienne a de multiples bienfaits. Premièrement, elle est un facteur de cohésion sociale, réunissant autour de la même table tous les enfants, qui ne sont plus stigmatisés. Indifférenciés, on ne distingue plus le musulman ou le juif qui évite le porc du végétarien qui évite la viande.

Deuxièmement, elle est bonne pour la santé. Contrairement aux préjugés encore en cours, un régime végétarien ou même végétalien n'entraîne aucune carence, à partir du moment où il est équilibré. Les protéines sont bien présentes dans les végétaux, comme le montre l'exemple du soja. Des préparations comme le tofu, le tempeh ou le seitan sont des alternatives aux produits carnés. Ils sont aussi un plaisir pour le palais ! C'est la consommation excessive de viande qui est source de maladies, notamment sur le plan cardio-vasculaire, surtout quand elle est issue de l'industrie.

Troisièmement, l'alternative végétarienne est écologique. Alors que la France accueille du 30 novembre au 11 décembre la Conférence internationale sur le climat (COP21), et que convaincre les Etats de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre est l'une des priorités de sa politique étrangère, il est impératif de commencer à agir sur l'une des causes majeures du changement climatique : la consommation de viande.

Selon le dernier rapport de l'Organisation des nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, l'élevage, responsable de 60 % des émissions de méthane – un gaz qui réchauffe vingt-cinq fois plus que le CO2 –, totalise 14,5 % de la production de gaz à effet de serre. Greenpeace ajoute que 80 % des déforestations en Amazonie sont causées par l'élevage de bétail. Les élevages sont à l'origine d'une part importante de la pollution des sols et des rivières.

C'est pourquoi nous appelons à ce que la loi française impose dans chaque cantine scolaire, mais aussi dans les restaurants universitaires et les administrations, une alternative végétarienne, voire végétalienne. Il s'agirait d'une avancée citoyenne majeure et d'un geste fort en faveur de l'environnement et de ce « vivre ensemble » que tant invoquent sans rien faire pour le promouvoir.

 

Sandrine Bélier (ancienne députée européenne EELV), Allain Bougrain-Dubourg (journaliste et réalisateur), Florence Burgat (philosophe), Aymeric Caron (journaliste et écrivain), Franz-Olivier Giesbert (journaliste et écrivain), Jean-Baptiste Jeangène Vilmer (philosophe) et Matthieu Ricard (fondateur de l'organisation humanitaire Karuna-Shechen).


En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/03/26/le-repas-vegetarien-le-plus-laique-de-tous_4602163_3232.html#51RDler3K680hRkr.99

samedi 14 mars 2015

« L'Algérie c'est notre paradis », lance Ménard en débaptisant une rue de Béziers Le Monde le 14 mars 2015 à 18h18

Le maire d'extrême droite a choisi de débaptiser la « rue du 19 mars 1962 » en « rue du commandant Denoix de Saint-Marc », un des putschistes de 1961.

C'est une manière très concrète d'« effacer la honte du 19 mars 1962 », date de la signature des accords d'Evian entraînant un cessez-le-feu en Algérie. Robert Ménard, maire extrême droite de Béziers (Hérault), a choisi de débaptiser, samedi 14 mars, la « rue du 19 mars 1962 », en « rue du commandant Denoix de Saint-Marc », du nom d'un des putschistes de 1961, le commandant Hélie de Saint-Marc.

« L'Algérie, c'est notre paradis [...]. Demandez à nos compatriotes ce que furent les jours après le 19 mars », a lancé M. Ménard, au cours d'une cérémonie qui a eu lieu devant environ 2 000 à 2 500 personnes, dont 500 opposants, qui l'ont hué aux cris de « Ménard facho, Ménard assassin ! »

« Non, je ne veux plus que nous soyons dans la repentance, je veux dire notre vérité à ceux qui armaient le bras des assassins des harkis, aux bourreaux qui nourrissent encore une haine de la France. »

« Pour nos frères musulmans, il ne faut pas occulter la réalité de notre histoire, Hélie de Saint-Marc était de ceux qui pouvaient mourir pour des idées, pour eux », a encore déclaré l'élu, qui a achevé son discours sous les acclamations de ses partisans, qui scandaient « Algérie française »Ils ont ensuite entonné « Le Chant des Africains »un chant militaire repris pendant la guerre d'Algérie par les pieds-noirs et les partisans de l'Algérie française.

Opposition d'associations et de syndicats

Robert Ménard met en avant le passé de résistant et de déporté d'Hélie Denoix de Saint-Marc pendant la seconde guerre mondiale. Mais cet officier, qui a également servi en Indochine, est surtout connu pour avoir participé au putsch des généraux, coup d'Etat manqué contre le général de Gaulle, le 21 avril 1961. Condamné pour cet acte à dix ans de prison, il a été gracié en 1966 et réhabilité en 1978.

La décision du maire a suscité l'opposition de plusieurs associations et syndicats. Dans une pétition en ligne qui a recueilli plus de 3 000 signatures, ils appellent à dire « non au colonialisme, révisionniste et raciste ».

Depuis son élection à Béziers sous l'étiquette du Rassemblement bleu marine, proche du Front national, Robert Ménard a régulièrement suscité des polémiques, en installant une crèche catholique à la mairie, en interdisant le linge aux fenêtresou en armant les policiers municipaux.

Le 14 mars 2015 à 18h18

dimanche 8 mars 2015

Banlieues : les leçons étrangères de la politique de la ville PAR MICHAËL HAJDENBERG MLE 4 MARS 2015 MEDIAPART

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La politique de la ville est un échec en France depuis 30 ans. Gauche et droite adoptent les mêmes recettes, qui ne débouchent que sur peu de résultats concrets. Mais comment font les pays étrangers ? N'y a-t-il pas des solutions à aller y chercher ? Entretien avec Thomas Kirszbaum, sociologue qui a dirigé l'ouvrage En finir avec les banlieues.

Qui croit encore aux vertus de la politique de la ville ? Cela fait 30 ans que gauche et droite échouent à redynamiser les banlieues. Les recettes sont souvent les mêmes, les résultats par conséquent identiques. L'ambitieux programme de rénovation urbaine initié par Jean-Louis Borloo a changé l'apparence de certains quartiers. Moins souvent la vie de leurs habitants. Le diagnostic, en partie dressé par la Cour des comptes, est précisément établi dans le livre En finir avec les banlieues ? Le désenchantement de la politique de la ville (éditions de l'Aube), un ouvrage collectif dirigé par Thomas Kirszbaum, sociologue, chercheur à l'École normale supérieure de Cachan.

La dernière partie de l'ouvrage est consacrée aux réponses apportées à l'étranger, notamment en Grande-Bretagne, en Allemagne et aux Pays-Bas. Comment les habitants sont autorisés à se saisir directement des problématiques qui les concernent ? Comment est envisagée la mixité sociale ? À quel point sont prises en compte les particularités ethniques ? Pas de solution magique, mais des pistes, des idées, dont la France pourrait s'inspirer. 


mardi 3 mars 2015

Roger Cukierman en mission de sensibilisation à Washington Par Stéphanie Le Bars, Le Monde le 4 mars 2015 à 01h36

Le président du Conseil représentatif des institutions juives de France souhaitait alerter ses « amis américains » sur la hausse de l'antisémistisme dans l'Hexagone.

Une pleine page de publicité dans le New York Times, lundi 2 mars. Des interviews à la chaîne, et en anglais, avec la presse américaine. Une prise de parole devant des représentants de l'American Israel Politic Affairs Committee (Aipac), le plus puissant groupe de pression pro-israélien des Etats-Unis, réuni à Washington. Et enfin une rencontre avec des élus du French Caucus au Congrès, le mardi 3 mars.

Roger Cukierman, le président du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), a mis à profit ses 48 heures passées dans la capitale pour alerter ses « amis américains »sur la hausse de l'antisémitisme en France et demander aux grandes entreprises du Net de contrer la multiplication des propos antisémites sur les réseaux sociaux.

POUR APPROFONDIR

Lire aussi en édition abonnés :  La communauté juive s'alarme d'une forte hausse de l'antisémitisme

Des djihadistes formés par Internet

S'inscrivant dans les pas du ministre de l'intérieur, Bernard Cazeneuve, qui le 20 février était venu en Californie pour mobiliser les firmes du numérique dans la lutte contre le djihad en ligne, M. Cukierman a rappelé, que les entreprises concernées étant régies par le droit américain, les juifs de France avaient « besoin des Etats-Unis pour les convaincre de mettre un terme à ces flots de haine ». Evoquant le profil des djihadistes, il a souligné qu'ils n'étaient « pas formés dans les mosquées ou par la presse », mais par Internet.

« Ils attaquent les juifs, mais pas seulement, ils attaquent aussi les musulmans, les policiers, la liberté d'expression, la civilisation occidentale en essayant d'instaurer la charia. C'est une guerre mondiale. » « Il faut donc mettre la pression sur les réseaux sociaux pour que les messages de haine soient supprimés. C'est possible, car ils l'ont fait avec la pédophilie », a-t-il insisté. En 2012, l'Union des étudiants juifs de France (UEJF) avait dû batailler plus d'un an pour obtenir de Twitter que l'entreprise fournisse à la justice française des données permettant l'identification de certains des auteurs de tweets antisémites, suscités par le mot-clé #unbonjuif.

L'influence des leaders musulmans

Alors qu'une partie de l'opinion publique américaine se montre sensible à la hausse de l'antisémitisme en France et en Europe, M.Cukierman a décrit la situation des juifs de France, qui depuis les attentats de début janvier à Paris, envoient leurs enfants dans des « écoles gardées par des policiers et des soldats en armes ».

« Nous avons de l'antisémitisme dans toutes les parties de la société française, mais les seuls qui agissent avec violence sont des membres de la population musulmane, même si c'est une très petite minorité de cette population », a-t-il insisté, reprenant une appréciation qui a récemment provoqué une brouille avec le Conseil français du culte musulman. Le président du Crif s'est aussi interrogé sur « l'influence des leaders musulmans », se demandant si « leur message passait, ou s'il y avait même un message ? ».

POUR APPROFONDIR

Lire aussi en édition abonnés :  Roger Cukierman suscite la colère des représentants de l'islam

Le discours de M. Nétanyahou

Alors que le premier ministre israélien s'est exprimé, mardi, devant le Congrès américain, M. Cukierman s'est refusé à commenter ce discours controversé lié au programme nucléaire iranien. « J'ai assez de problème avec la politique en France, je ne vais pas m'impliquer dans la politique israélienne et américaine », a-t-il éludé, en référence à la récente polémique suscitée en France par ses propos sur Marine Le Pen.

Mais il a tenu à réaffirmer sa conviction que la résurgence de l'antisémitisme n'était pas liée à la politique conduite par Israël, notamment dans les territoires palestiniens occupés. Réagissant à l'appel lancé par Benyamin Netanyahou aux juifs de France, M. Cukierman a estimé qu' « une personne qui envisage de quitter la France ne le fait pas parce que le premier ministre israélien le lui demande. Il s'agit toujours d'une décision personnelle ». Selon le président du CRIF, « entre 10 000 et 15 000 des 500 000 juifs de France » pourraient s'expatrier en Israël en 2015, contre quelque 7 000 en 2014.

Le 4 mars 2015 à 01h36

Stéphanie Le BarsWashington, correspondance