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samedi 30 novembre 2013

Voile au travail : comment le sondage de France 3 a été manipulé Sous le voile des sondages en ligne


Mise à jour :  La rédaction de France 3 nous a indiqué « mener actuellement l'enquête » sur les résultats de ce sondage. « Nous donnerons ce soir a priori les résultats du vote d'hier. Nous communiquerons à cette occasion l'explication de ce qu'on aura trouvé ». À son stade de l'enquête, la rédaction nous confirme déjà que « ce n'est pas un vote qui s'est passé régulièrement. C'est une hypothèse, une piste, mais quelques personnes ont pu voter en masse » nous confirme-t-on. Est-il normal pour autant de s'appuyer autant sur de tels votes ? « Le débat est ouvert ». Et quid de la sécurisation de ces opérations menées avec les téléspectateurs-internautes ? « On réfléchit à ce dont vous nous parlez ». Nous attendons de plus amples explications de la chaîne et du CSA.


Hier, le journal du Grand Soir 3 a refusé de diffuser les résultats d'un sondage mené sur son site en ligne, sondage qui portait sur le caractère choquant ou non du licenciement de la salariée voilée de la crèche Baby-loup. L'auteur des faits explique sa démarche, en détaillant quelque peu le mode opératoire.

Ce JT du Grand Soir de France 3 est tombé sur un os hier. Il n'a finalement pas donné les résultats de son sondage sur le licenciement pour port du voile au travail. Et pour cause, « nous n'avons pas pu donner la réponse à la question à cause d'une activité anormale ce soir sur le site de France TV Info. », activité suspecte « qui ressemble en gros à du piratage »

 

Sur AL-Kanz, l'auteur de ce hack revient sur son acte pour expliquer sa démarche. « Nombreuses sont les chaînes à lancer des sondages en ligne, un peu du genre « la question du jour ». Tout le monde fait ça, M6, BFM, même la chaîne parlementaire ! J'ai simplement voté un peu plus que la normale. »

 

sondage france 3

 

Lorsqu'il s'est rendu sur le site de France TV vers 22h50, le « Oui » l'emportait à 69 %. « Les partisans du oui s'étaient mobilisés sur les réseaux sociaux. Comme on a pu le lire hier soir sur Twitter et Facebook, des SMS ont par ailleurs été envoyés toute la soirée. Rien de nouveau sous le soleil : c'est une pratique très ancrée chez les militants politiques, de droite comme de gauche (UMP, PS, etc.) et chez de nombreux internautes ».

64 000 votes, 64 000 cookies effacés, 64 000 fausses IP

L'intéressé a alors décidé de voter plus de 60 000 fois dans ce sondage en ligne (et même plus de 64 000), pour pousser jusqu'à l'absurde ces sondages qui alimentent trop facilement les grandes chaînes de TV, « fabriquent l'opinion et ont un impact important sur la perception des individus dans la société ». Selon lui, « les sondages sur Internet qui partent de l'idée induite que certaines minorités sont un problème et qui sont ensuite validés à la télévision sont un danger pour la société. Mes 60 000 votes auront peut-être réussi à faire prendre conscience à chacun de ce danger. Je l'espère ».

 

L'intéressé réfute l'expression de piratage : « aucun dommage ni aucune intrusion » assure-t-il, contrairement à ce qu'a annoncé la chaîne de TV. Il décrit même le mode opératoire : « d'habitude, l'internaute qui veut voter plusieurs fois supprime le cookie du site qui publie le sondage, puis revote. Il supprime autant de fois le cookie qu'il veut voter. Les sites d'extrême-droite sont coutumiers de cette pratique. Pas étonnant que les résultats sur les grands sites d'information soient généralement très orientés… Dans mon cas, j'ai simplement automatisé cette pratique et réussi à mener à plus grande échelle ce que l'internaute polyvotant fait manuellement, sans m'introduire, je le répète, frauduleusement sur le site de FranceTV. Pas convaincu ? Eh bien, je n'ai fait qu'utiliser une technique reproductible par n'importe qui à l'aide d'un navigateur Internet (Chrome ou Firefox) et une extension appelée « IpFlood » . »

 

Une extension conçue par Paul Da Silva, autrefois connue sous le nom d'IPFuck et qui permet de générer aléatoirement des adresses IP pour faire croire aux sites visités que chaque internaute est différent (simulation d'un changement aléatoire de proxy)

Ni sécurisé, ni fiable

Toujours sur Al-Kanz, l'auteur de cette manipulation ne décolère donc pas contre les chaînes notamment publiques qui ont recours à ce type de sondage à tour de bras : « on utilise des systèmes de vote qui ne sont pas du tout sécurisés et donc complètement faillibles. Puis, on diffuse les résultats à la télé comme si c'était une information fiable et sérieuse. Comment cela se fait-il que FranceTV ne vérifie pas si l'IP est bien française ? Qu'on puisse voter sans être inscrit ? Que l'on puisse voter 60 000 fois avec seulement deux IP ? Si 500 000 Chinois et 500 000 Indiens avaient voté, on aurait pris en compte leur vote ? »

 

Le but de cette manipulation était donc de montrer que « ces sondages ne valent rien » car « pour sonder l'opinion, il y a des règles strictes. Il faut prendre un échantillon représentatif, et faire un vrai travail de sondeur (…) Dans le cas du sondage de FranceTV, c'est fait sans aucune règle, dans le plus grand n'importe quoi. Et le pire, c'est que vu que ça passe à la télé, dans un écran derrière le présentateur qui vous fixe très sérieusement dans les yeux en disant « vous avez répondu à la question du jour », on a l'impression qu'il s'agit de résultats officiels de présidentielles ou d'un référendum. Imaginez la puissance de la chose dans l'esprit du téléspectateur ? »

 

Le sondage non diffusé sur le plateau reste cependant diffusé en ligne, comme constaté ce matin. La rédaction, à raison, n'a pas voulu diffuser ces résultats pour ne pas tromper les téléspectateurs. Un traitement de bon père de famille dont n'ont pas eu droit les internautes.

Marc Rees

Journaliste, rédacteur en chef

lundi 25 novembre 2013

Voynet ne sera "pas candidate" à sa réélection à Montreuil 26.11.2013 à 01:34 | Le Monde.fr


La maire EELV de Montreuil, Dominique Voynet, a annoncé lundi qu'elle ne briguerait pas en 2014 un nouveau mandat à la tête de cette ville populaire de la banlieue est de Paris, dans une lettre transmise à l'AFP par son cabinet.AFP/MIGUEL MEDINA

"J'ai pris la lourde décision de ne pas me représenter en mars." C'estdans une longue lettre, publiée sur son blog, que la maire EELV de Montreuil, Dominique Voynet, a annoncé lundi 25 novembre qu'elle ne briguerait pas un nouveau mandat à la tête de cette ville de banlieue parisienne, en 2014. 

"Je mesure que, pour être réélue, je devrais me résoudre à des compromis, à des alliances, à des prises de position qui bousculent mes valeurs et mes convictions et me conduiraient à ne plus me ressembler", affirme l'ancienne ministre écologiste, 55 ans, maire depuis 2008. Le député socialiste Razzy Hammadi avait manifesté son intention d'être candidat face à la maire sortante. Des négociations sont en cours entre le PS et ses alliés écologistes.

"Je ne me retrouve pas dans un jeu politique local où la gauche s'écharpe depuis vingt ans, où chaque groupuscule prétend rassembler tout en se déchirant, où les seules majorités qui arrivent à se constituer sont éphémères et 'contre'"dit-elle aussi dans un entretien à Libération"Mon retrait n'est pas une désertion, mais une façon de marquer ma distance avec ce jeu politique. Je ne suis pas prête à gagner à tout prix."

>> Lire (en édition abonnés) : A Montreuil, Dominique Voynet reste sa meilleure ennemie

"DÉGRADATION DE LA VIE POLITIQUE"

Dominique Voynet, qui a annoncé sa décision à son équipe municipale puis aux militants EELV, lance aussi une attaque à peine voilée contre ses adversaires.

"Je souffre profondément de la dégradation de la vie politique et du climat qui conduit, à Montreuil comme ailleurs, à englober tous les politiques d'une même suspicion, et de plus en plus souvent d'un même mépris, ceux qui ne cumulent pas comme ceux qui cumulent, ceux qui sont intègres comme ceux qui sont corrompus, ceux qui brossent leurs clientèles dans le sens du poil comme ceux qui refusent d'accorder des passe-droits, y compris à leurs plus proches amis", écrit l'ex-candidate à la présidentielle de 1995 puis de 2007.
"Je refuse de partir en campagne en promettant logement et jobs 'à la mairie' à tour de bras ; de garantir à toute personne rencontrée dans la rue que sa demande, même injustifiée, sera traitée 'en priorité' (...), de promettre à chaque dirigeant d'association évoquant sans pudeur l'imminence des élections une augmentation de sa subvention annuelle."

Seule maire écologiste d'une ville de plus de 100 000 habitants, elle ajoute qu'elle "refuse de 'rendre coup pour coup', d'user du mensonge, de la calomnie et de l'insulte (...) de la démagogie la plus abjecte et d'arguments aux relents lepénistes".

L'ANCIEN MAIRE PC VISÉ

Défendant longuement son bilan à la mairie, l'ancienne ministre de l'environnement du gouvernement Jospin affirme être"en pleine forme" et annonce qu'elle assumera sa mission jusqu'à la fin de son mandat. "Cela a été une expérience extraordinaire (...). Je m'y suis sentie le plus en phase avec la réalité, et la plus utile", confie-t-elle aussi, dansLibération, à propos de ses cinq années passées à Montreuil.

Semblant viser l'ex-communiste Jean-Pierre Brard, auquel elle avait arraché en 2008 la ville de Seine-Saint-Denis qu'il dirigeait depuis 24 ans, l'ancienne patronne des Verts dénonce aussi ceux "dont le seul projet est de reconquérir ce qu'ils considèrent comme leur bien, leur fief, à n'importe quel prix". Dominique Voynet avait été élue malgré le soutien officiel apporté par le PS à Jean-Pierre Brard, même si plusieurs socialistes l'avaient rejointe durant sa campagne.

Aujourd'hui, M. Brard, qui entend bien reconquérir la ville, est "le seul candidat sérieux" pour 2014, d'après Mme Voynet. Il se présente contre son ancien directeur de campagne, Patrice Bessac, un dirigeant du PCF de 35 ans investi par le Front de gauche, dont il raille "les ambitions personnelles".

>> Lire la note de blog : Montreuil : les divisions du Front de gauche entravent l'opération reconquête

vendredi 22 novembre 2013

Non, "Charlie Hebdo" n’est pas raciste ! 20.11.2013 à 16:12 | LE MONDE . Charb (Directeur de publication "Charlie Hebdo") et Fabrice Nicolino (Journaliste)


Le dessinateur Charb, dans les locaux de Charlie Hebdo, en septembre 2012. AFP/FRED DUFOUR

Charlie, notre Charlie Hebdo a mal aux tripes et au coeur. Car voilà qu'une incroyable calomnie circule dans des cercles de plus en plus larges, qui nous est rapportée chaque jour. Charlie Hebdo serait devenu une feuille raciste.

Un jour, un chauffeur de taxi arabe exige de l'un des collaborateurs du journal, reconnu par lui, qu'il descende aussitôt, au motif de dessins moquant la religion musulmane. Un autre jour, un interlocuteur nous refuse un entretien pour la raison qu'il"ne parle pas à un journal de gros racistes". Et, quand le crapuleux Minute s'en prend de la manière que l'on sait à Christiane Taubira, il se trouve des imbéciles, jusque dans les télévisions, pour accoler des couvertures de notre journal à celles de ce torchon raciste.

PROCÈS EN SORCELLERIE

Mais où est passée la conscience morale, si toutes les vilenies deviennent à ce point ordinaires ? Nous avons presque honte de rappeler que l'antiracisme et la passion de l'égalité entre tous les humains sont et resteront le pacte fondateur de Charlie Hebdo.

Bien entendu, le procès en sorcellerie que tant d'esprits faibles nous font ne peut être mené qu'en secret, loin de la lumière, en l'absence de toute défense. Car la lecture de notre journal est la preuve définitive de ce que nous affirmons ici. Ceux qui osent dire le contraire ne nous lisent pas, et se contentent de se délecter d'une abominable rumeur.

Pour les autres, qui respectent encore des valeurs élémentaires, voici en quelques phrases notre histoire. Créé après l'interdiction d'Hara Kiri hebdo par le ridicule pouvoir gaulliste de 1970, Charlie Hebdo est fils de Mai 68, de la liberté, de l'insolence, et de personnalités aussi clairement situées que Cavanna, Cabu, Wolinski, Reiser, Gébé, Delfeil de Ton…

Qui oserait leur faire un procès rétrospectif ? Le Charlie Hebdo des années 1970 aura aidé à former l'esprit critique d'une génération. En se moquant certes des pouvoirs et des puissants. En riant, et parfois à gorge déployée, des malheurs du monde, mais toujours, toujours, toujours en défendant la personne humaine et les valeurs universelles qui lui sont associées.

L'un des drames des calomniateurs, c'est que Cavanna, Cabu, Wolinski sont toujours là, fidèles au poste chaque semaine, sans avoir jamais renié une once de leur passé. Contrairement à tant d'autres, qui ont eu le temps, en quarante années, de changer plusieurs fois de costume social, l'équipe de Charlie continue sur la même route.

Nous rions, nous critiquons, nous rêvons encore des mêmes choses. Ce n'est pas trahir un secret : l'équipe actuelle se partage entre tenants de la gauche, de l'extrême gauche, de l'anarchie et de l'écologie. Tous ne votent pas, mais tous ont sablé le champagne quand Nicolas Sarkozy a été battu en mai 2012.

NOUS AVONS CHOISI NOTRE CAMP

Aucun d'entre nous ne songerait à défendre la droite, que nous combattrons jusqu'au bout. Quant aux fascismes, quant au fascisme, nous considérons évidemment cette engeance comme un ennemi définitif, qui ne s'est d'ailleurs jamais privé de nous traîner devant les tribunaux.

Ouvrez donc ce journal ! Jean-Yves Camus y suit avec la rigueur qu'on lui connaît l'activité des extrêmes droites. Laurent Léger dévoile les turpitudes des réseaux si étendus de la corruption. Bernard Maris décortique l'économie et le capitalisme comme aucun autre. Patrick Pelloux raconte avec douceur les horreurs des urgences hospitalières. Gérard Biard ferraille contre le sexisme et la pub. Zineb el Rhazoui critique – oui, et de belle manière – les insupportables manifestations de certain islamisme. Fabrice Nicolino regarde le monde en écologiste radical, mais humaniste. Sigolène Vinson détaille le quotidien absurde de tant de tribunaux. Luce Lapin défend avec une opiniâtreté sans borne les animaux, ces grands absents du débat. Antonio Fischetti raconte la science, les sciences avec drôlerie et impertinence. Philippe Lançon proclame chaque semaine la victoire de la littérature sur la télé. Et puis tous les autres ! Quant aux dessinateurs, qui ne connaît leur trait ?

De Charb à Riss, de Luz à Willem, de Riad Sattouf à Tignous, en passant par Honoré, Catherine et bien sûr Wolin et Cabu, ils font rire chaque semaine ceux qui n'ont pas renoncé à être libres.

Où seraient cachés les supposés racistes ? Nous n'avons pas peur d'avouer que nous sommes des militants antiracistes de toujours. Sans nécessairement avoir une carte, nous avons choisi dans ce domaine notre camp, et n'en changerons évidemment jamais. Si par extraordinaire – mais cela n'arrivera pas – un mot ou un dessin racistes venaient à être publiés dans notre hebdomadaire, nous le quitterions à l'instant, et avec fracas. Encore heureux !

Reste dans ces conditions à comprendre pourquoi. Pourquoi cette idée folle se répand-elle comme une maladie contagieuse ? Nous serions islamophobes, disent nos diffamateurs. Ce qui, dans la novlangue qui est la leur, signifie racisme. Où l'on voit combien la régression a gagné tant d'esprits.

La "une" de "Charlie Hebdo" du 19 septembre. DR

NOUS CONTINUERONS, BIEN SÛR

Il y a quarante ans, conspuer, exécrer, conchier même les religions était un parcours obligé. Qui entendait critiquer la marche du monde ne pouvait manquer de mettre en cause les si grands pouvoirs des principaux clergés. Mais à suivre certains, il est vrai de plus en plus nombreux, il faudrait aujourd'hui se taire.

Passe encore que Charlie consacre tant de ses dessins de couverture aux papistes. Mais la religion musulmane, drapeau imposé à d'innombrables peuples de la planète, jusqu'en Indonésie, devrait, elle, être épargnée. Pourquoi diable ? Quel est le rapport, autre qu'idéologique, essentialiste au fond, entre le fait d'être arabe par exemple et l'appartenance à l'islam ?

Nous refusons de nous cacher derrière notre petit doigt, et nous continuerons, bien sûr. Même si c'est moins facile qu'en 1970, nous continuerons à rire des curés, des rabbins et des imams, que cela plaise ou non. Nous sommes minoritaires ? Peut-être, mais fiers de nos traditions en tout cas. Et que ceux qui prétendent et prétendront demain que Charlieest raciste aient au moins le courage de le dire à voix haute, et sous leur nom. Nous saurons quoi leur répondre.

Jh

mercredi 13 novembre 2013

Le racisme progresse-t-il en France ? 13.11.2013 à 18:10 | Le Monde.fr Samuel Laurent

Le 6 avril 2008, des inscriptions nazies, antisémites et islamophobes avaient été découvertes dans le cimetière Notre-Dame-de-Lorette à Ablain-Saint-Nazaire (Pas-de-Calais). AP/MICHEL SPINGLER

"La France n'est pas raciste", selon le député UMP Thierry Mariani. Pour Marine Le Pen, elle est même"le pays le moins raciste au monde". Après la "une" nauséabonde du journal d'extrême droite Minute,reprenant les attaques racistes contre la ministre de la justice, Christiane Taubira, plusieurs voix s'élèvent pour fustiger la "bien-pensance" ou la "pensée unique" et assurer que notre pays n'a pas de problème de racisme.

Pourtant, les enquêtes sur la question sont moins optimistes. La Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) procède chaque année à une étude de la question, appuyée notamment sur une enquête d'opinion, réalisée fin 2012 par CSA auprès de 1 029 personnes. Ses résultats pour 2012 sont assez parlants.

Pas moins de 7 % des sondés s'avouent "plutôt racistes" et 22 % "un peu racistes". Un quart (25 %) se disent "pas très racistes" et 44 % "pas racistes du tout", un chiffre en baisse de cinq points en un an. Par ailleurs, les deux tiers des sondés (65 %) estiment que "certains comportements peuvent parfois justifier des réactions racistes".

MONTÉE RAPIDE DU SENTIMENT XÉNOPHOBE

Ce sondage donnait d'autres indications. Ainsi, une nette majorité des interrogés (60 % contre 29 %) estime que "ce sont avant tout les personnes d'origine étrangère qui ne se donnent pas les moyens de s'intégrer". Une majorité (52 %) pense que "les personnes de différentes origines qui composent la société française vivent ensemble avec des tensions", contre 8 % seulement qui assurent qu'elles vivent ensemble "en bonne entente".

Autre indicateur : si les "Nord-Africains et musulmans" sont jugés comme les "principales victimes de racisme" (43 %), devant les "étrangers/immigrés" sans précision (25 %) puis les "Africains/Noirs'" (22 %), 12 % des sondés estiment que ce sont "les Français" qui sont les principales victimes du racisme en France.

Un graphique illustre aussi l'évolution des sentiments des sondés sur différents arguments. Il montre une montée rapide du sentiment xénophobe : alors qu'en 2009, 47 % des sondés estimaient qu'"il y a trop d'immigrés en France", ils sont désormais 69 % à partager ce sentiment.

CNCDH

Si cette enquête doit être prise pour ce qu'elle est, un simple sondage, elle tend à montrer la persistance, en France, d'une forme de racisme et d'une xénophobie en hausse.

Quant à la France, "pays le moins raciste du monde", une étude suédoise récente n'était pas d'accord. Basée sur une enquête mondiale menée par deux économistes dans 80 pays, elle demandait à des échantillons de personnes qui elles ne voudraient pas avoir pour voisin. LeWashington Post en avait extrait une carte basée sur le taux de réponses indiquant "des gens d'une autre race". Si ce taux était de moins de 5 % aux Etats-Unis, il oscillait entre 20 % et 30 % pour la France. Là encore, si ce type d'étude reste partiel, il permet de donner des pistes.

Enfin, la CNCDH rappelait dans son dernier rapport la "forte augmentation" des actes et menaces à caractère raciste, en hausse de 23 % en un an. Et un graphique illustre assez bien cette hausse constante, depuis le début des années 1990.

CNCDH

mardi 12 novembre 2013

Matignon saisit le parquet après la "une" de "Minute" sur Taubira 13.11.2013 à 00:27 | Le Monde.fr avec AFP

La ministre de la justice, Christiane Taubira, à son arrivée à l'Elysée, le 3 novembre. AP/JACQUES BRINON

Le premier ministre Jean-Marc Ayrault a saisi mardi 12 novembre le procureur de la République de Paris au sujet de la "une" de l'hebdomadaire d'extrême droiteMinute sur Christiane Taubira, "en application de l'article 40 du Code de procédure pénale [afin] de porter ces faits susceptibles de constituer l'infraction d'injure publique à caractère racial".

Dans son édition à paraître mercredi, Minute reprend en "une" les injures racistes dont la ministre de la justice a déjà été victime. "Maligne comme un singe, Taubira retrouve la banane", titre l'hebdomadaire d'extrême droite. En début de soirée, le ministre de l'intérieur, Manuel Valls, avait annoncé que le gouvernement étudiait les "moyens d'agir contre la diffusion" de Minute"Nous ne pouvons pas laisser passer cela", avait-il ajouté, en dénonçant une "une" "révoltante".

Le Lab d'Europe 1 croyait pourtant savoir que la garde des sceaux n'allait pas engager d'action juridique contre la publication. Réagir, "c'est faire augmenter les ventes de l'hebdomadaire de 10 %",précisait l'entourage de Christiane Taubira. L'association SOS Racisme avait, elle, annoncé un peu plus tôt qu'elle allait déposer plainte pour incitation à la haine raciale contre l'hebdomadaire. La plainte devrait déposée prochainement devant le tribunal de grande instance de Paris.

>> Lire notre synthèse (édition abonnés) : Pourquoi Christiane Taubira cristallise les haines

UNE "UNE" "SATIRIQUE" ?

"Si des associations veulent le monter en sauce, c'est leur problème (...) Nous trouvons que c'est indécent, il y a plein d'autres problèmes dans ce pays", a réagi la porte-parole de Minute, Hélène Valette. "Nous assumons cette 'une', c'est satirique, personne ne s'offusque des 'unes' de Charlie Hebdo", a-t-elle ajouté. Sur le même mode, l'article consacré à Mme Taubira qualifie de "non événement" les précédentes attaques contre la ministre guyanaise.

L'hebdomadaire, à paraître mercredi en kiosque, surfe sur les insultes racistes qui ont récemment visé la ministre de la justice, comparée à une guenon par une militante FN puis par une enfant lors d'une manifestation hostile au mariage pour tous."Cette nouvelle provocation confirme que les insultes envers la garde des sceaux n'étaient pas un acte isolé", analyse SOS Racisme, qualifiant cette "une" d'"absolument intolérable et abjecte".

>> Lire aussi notre éditorial :Taubira, la banane et les dérives du politiquement incorrect

L'hebdomadaire a suscité l'indignation générale avec cette couverture. De nombreux internautes réclamaient "un procès" contre Minute, estimant que sa "une" tombait sous le coup de la loi. "Couverture abjecte""à vomir""du papier toilette","couverture honteuse"… Les réactions indignées étaient innombrables mardi, le mot "minute" devenant l'un des sujets les plus commentés sur Twitter.

"PROPOS HONTEUX ET NAUSÉABONDS"

Plusieurs membres du gouvernement ou du Parti socialiste (PS) ont également tenu à dénoncer la "une" de l'hebdomadaire et exprimer leur soutien à Christiane Taubira.Harlem Désir, premier secrétaire du PS et ancien président de SOS Racisme, a ainsi réclamé la saisie du numéro incriminé de l'hebdomadaire.

La ministre des sportsValérie Fourneyron, a dénoncé quant à elle une "'une' inacceptable", toujours sur Twitter. "J'apporte tout mon soutien à ma collègue Christiane Taubira devant ces propos honteux et nauséabonds".La ministre de la santé, Marisol Touraine, a rédigé un tweet pour dénoncer cette "une" "incitant à la haine raciale".

"Ils n'ont donc pas de limites. C'est même à ça qu'on les reconnaît. Pas une #Minute à perdre. Les nazes en cage", a également twitté Jean-Luc Mélenchon, coprésident du Parti de gauche.

LE PEN "HEUREUSE" DE SE FAIRE "CRACHER DESSUS" PAR "MINUTE"

A droite, les réactions indignées se font moins nombreuses. Le député Union pour un mouvement populaire (UMP) Eric Ciotti s'est toutefois déclaré "choqué" par "La 'une' de Minute""C'est une provocation, une dérive, je la condamne. Le racisme n'a aucune place dans le débat politique. Mais je mets aussi en garde la majorité sur les tentatives de récupération de ces sujets. Lorsqu'on veut les exploiter politiquement, on les entretient aussi", a-t-il précisé dans les couloirs de l'Assemblée nationale. 

La présidente du Front national,Marine Le Pen, a également condamné Minute sur son compte Twitter, se déclarant "heureuse" de se "faire cracher dessus chaque semaine par Minute". Le FN a pris ses distances avec Minute, en particulier depuis janvier, quand le journal avait fait sa "une" sur un supposé lobby gay au sein du parti. Marine Le Pen avait alors qualifié le journal de "torchon".

vendredi 8 novembre 2013

A Marseille, Ayrault face à la réalité qu'il veut combattre 08.11.2013 à 2 Vgn eqy huy e ez ta0:49 | Le Monde.fr Gilles Rof (Correspondantx à Marseille)cy

AFP/BERTRAND LANGLOIS

"Notre responsabilité est d'ouvrir les yeux sur la frustration qui monte face aux retards accumulés et aux inégalités qui se creusent."Quelques heures après avoir prononcé ces mots devant un parterre d'élus et de représentants de l'Etat, à la préfecture des Bouches-du-Rhône, en ouverture de sa visite officielle à Marseille vendredi 8 novembre, Jean-Marc Ayrault est allé voir de plus près cette réalité qu'il veut combattre. En début d'après-midi, il est arrivé à la cité de la Castellane, dans le 16e arrondissement.

Un ensemble symbole des quartiers nord, regroupant plus de mille logements. Une forêt de tours imposantes que l'Etat a ciblée comme "prioritaires" dans son "plan d'action pour l'agglomération Aix-Marseille", dévoilé dans la matinée.

La Castellane, c'est également un des dossiers que la sénatrice socialiste Samia Ghali, maire du secteur, souhaitait voir pris en main immédiatement par l'Etat. Aux côtés de Patrick Mennucci, le candidat socialiste aux municipales, l'élue des quartiers nord, qui a désormais l'oreille du gouvernement, ne cachait pas sa satisfaction d'avoir "fait venir le premier ministre" : "L'Etat prend enfin en compte la fracture nord-sud de Marseille", assurait-elle, radieuse. Dans la foule des élus suivant le cortège. Pas de représentant, en revanche, du maire UMP, Jean-Claude Gaudin, qui, le matin, avait dénoncé une"tournée électorale visant à soutenir le candidat socialiste".

"ON ESPÈRE FORT, FORT, FORT QU'ELLE SERA SUIVIE D'EFFETS"

Sous le regard d'habitants dubitatifs, M. Ayrault a soigneusement évité le sempiternel couplet sur la sécurité des visites ministérielles. Dans la délégation, sous forte escorte, pas de Manuel Valls ou Christiane Taubira. Le chef du gouvernement avait choisi de s'entourer de François Lamy, le ministre de la ville, Marylise Lebranchu, la ministre à la décentralisation, et Marie-Arlette Carlotti, marseillaise et ministre à la lutte contre l'exclusion. Face aux habitants et aux responsables associatifs, le premier ministre a préféré parler emploi, rénovation urbaine, transports et amélioration de la vie quotidienne. Tous des volets importants de son plan de 3,5 millions d'euros engagés pour la métropole marseillaise.

Durée : 00:35 | Images : I-Télé

En visite à Marseille, vendredi 8 novembre, le premier ministre a annoncé plus de 3 milliards d'euros de crédit pour la ville, dans la lignée du "plan d'action pour Marseille" lancé le 6 septembre 2012. Parmi les mesures abordées, Jean-Marc Ayrault a évoqué la nécessité de s'attaquer aux transports et au système ferroviaire, annonçant la réalisation d'une gare souterraine sur le site de Marseille Saint-Charles, ce qui représente un investissement de 2,5 milliards d'euros.

La Castellane a beau avoir vu grandir Zinédine Zidane, elle cumule aujourd'hui les maux des quartiers nord de Marseille. En juin 2013, c'est dans ces tours que les policiers ont saisi 1,3 million d'euros en liquide, 53 kilos de cannabis et des armes. Un démantèlement de réseau de drogue qui reste un des succès majeurs de la nouvelle stratégie du gouvernement en matière de sécurité à Marseille.

La Castellane, c'est aussi une cité totalement enclavée, à près d'une demi-heure de voiture du Vieux-Port, desservie par une seule ligne de bus. Un territoire où le taux de chômage atteint 42 % des actifs.

Dans la grande salle du centre social, le directeur adjoint Philippe Amet ne cache pas l'asphyxie face au premier ministre.

"Nous étions arrivés à un point où, malgré toute la ténacité de la population, il était devenu très difficile de surmonter la précarité, le chômage, la dégradation du cadre de vie et bien sûr la délinquance et les difficultés économiques. Votre visite est une bouffée d'oxygène. On espère fort, fort, fort qu'elle sera suivie d'effets."

"Si je reviens à la Castellane, ça sera pour visiter un quartier transformé, a promis en retour Jean- Marc Ayrault. A la fois rénové pour les habitations, renforcé pour les services publics… Pour redonner une perspective et un avenir. Je prends l'engagement que ce qui est dit ici sera fait."

COMME TOUJOURS, ILS JUGERONT LES ANNONCES SUR PIÈCE

Evoquant un "château-fort à ouvrir", image assez proche de la réalité, François Lamy a promis le premier coup de pioche de la rénovation pour "la fin du premier semestre 2014".

Une rénovation à "mieux définir avec la population" mais dont les budgets sont d'ores et déjà réservés par l'Etat sur les crédits ANRU, l'Agence nationale pour la rénovation urbaine. En attendant l'arrivée du métro à l'hôpital Nord, annoncée également par le gouvernement, 2 millions d'euros seront débloqués immédiatement pour une "opération de désenclavement et d'amélioration du cadre de vie quotidien".

"Ici, tout est trop grand, trop dégradé. Il y a quatre bailleurs sociaux différents. C'est impossible à gérer", lâchait, blasée, la pimpante patronne du studio de coiffure K2 après avoir serré la main du premier ministre. A 63 ans, dont quarante-trois passés à la Castellane, elle ne voit, elle, qu'une solution : "Ce n'est pas une rénovation, c'est une démolition qu'il nous faut !"

A la table des ministres, face aux jeunes de la Castellane, la présence du nouveau directeur général national de Pôle Emploi, Jean Bassère, se veut symbolique. Dans le "plan d'action" du gouvernement, la "mobilisation en faveur de l'emploi dans les quartiers" occupe une large place. Les agences marseillaises vont recevoir 53 conseillers supplémentaires, dont certains seront en poste dans les centres sociaux. L'école de la Deuxième Chance, située à quelques kilomètres seulement de la Castellane, sera renforcée pour accueillir 67 élèves de plus.

Et l'Etat, comme l'a fait Jean-Marc Ayrault en rencontrant un peu plus tôt les entrepreneurs à la chambre de commerce et d'industrie, compte bien sensibiliser les entreprises pour qu'elles recrutent en priorité dans ces quartiers. "La mobilisation paye, assure Jean Bassère. Nous venons de boucler l'embauche de 422 personnes par une grande enseigne qui vient de s'installer dans ce secteur. Et 40 % des emplois sont revenus aux habitants des 14e, 15e et 16e arrondissements." A la sortie des ministres, les habitants de la Castellane ont regardé partir le cortège. Comme toujours, ils jugeront les annonces sur pièce.

AFP/BERTRAND LANGLOIS

jeudi 7 novembre 2013

Racisme contre Taubira : "Ce n'est pas le gouvernement qui a fait défaut" 07.11.2013 à 20:00 | Le Monde.fr Nicolas Chapuis


Christiane Taubira lors d'une visite au centre pénitentiaire pour femmes de Rennes, le 27 septembre. DAMIEN MEYER/AFP

Après les attaques racistes dont elle a fait l'objet, la ministre de la justice Christiane Taubira regrettait l'isolement dans lequel elle s'était retrouvée. "Les réactions n'ont pas été à la mesure, avait-t-elle déclaré dans une interview àLibération. Ce qui m'étonne le plus, c'est qu'il n'y a pas eu de belle et haute voix qui se soit levée pour alerter sur la dérive de la société française."

Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement, estime que le gouvernement a fait bloc derrière la ministre de la justice, et que les fautifs sont à chercher ailleurs.

Le Monde : Christiane Taubira, dans une interview au journalLibération, regrettait qu'aucune grande voix ne se soit exprimée pour la défendre. S'est-elle retrouvée isolée après les attaques racistes dont elle a fait l'objet ?

Alain Vidalies : C'est une mauvaise interprétation des propos de Christiane Taubira. Elle regrettait dans son interview l'absence de réaction de la part de grands intellectuels ou d'acteurs du débat public pour la défendre. Elle ne visait certainement pas le gouvernement, qui est derrière elle.

Le gouvernement a-t-il suffisamment défendu la ministre selon vous ?

Oui, tout à fait. J'ai pu lire dans des articles que le gouvernement ne l'avait pas soutenue. Ces accusations sont infondées. Bien au contraire, dès le mardi 29 octobre, j'ai été invité dans une émission sur Public Sénat au cours de laquelle j'ai déploré le fait que ce qui constituait pour moi un événement extrêmement grave ne fasse la "une" d'aucun média. Ce n'est pas le gouvernement qui a fait défaut sur le sujet.

Durée : 00:42 | Images : 

Dès le lendemain, le président de la République a d'ailleurs exprimé toute sa solidarité à la garde des sceaux au cours du conseil des ministres, et le premier ministre lui a apporté son soutien en réponse à une question de Jean Glavany, lors de la séance à l'Assemblée nationale.

Beaucoup de journaux ont depuis fait leur couverture sur la libération de la parole raciste. Le phénomène inquiète-t-il le gouvernement ?

Les images d'enfants brandissant des bananes et imitant le cri de la guenon sont révoltantes. C'est un acte très grave. Il y a une banalisation de ces faits qui touchent pourtant aux fondamentaux de la République. Une ligne rouge a été clairement franchie.

La ministre de la justice semble cristalliser la haine d'une partie de la droite radicalisée…

Christiane Taubira n'a pas choisi de devenir la cible de ces attaques. Elle est aujourd'hui livrée à la vindicte populaire avec des propos qu'on ne pensait pas entendre encore en 2013.

>> Lire nos explications (édition abonnés) : Pourquoi Christiane Taubira cristallise les haines


mardi 5 novembre 2013

Une candidate FN rend sa carte en dénonçant le racisme de son parti05.11.2013 à 18:56 | Le Monde.fr avec AFP

Dégoûtée par le racisme et l'homophobie d'une partie des cadres et militants locaux, la candidate du FN à Saint-Alban renonce à briguer la mairie, et rend sa carte d'adhérente.CAPTURE FACEBOOK

La candidate du Front national à Saint-Alban, Nadia Portheault, d'origine algérienne, renonce à briguer la mairie de cette commune au nord de Toulouse, dégoûtée par le racisme et l'homophobie d'une partie des cadres et militants locaux, a-t-elle indiqué, lundi 4 novembre, à La Voix du Midi.

Nadia Portheault et son mari, Thierry, ont également décidé de rendre leur carte d'adhérent. Le couple a constaté "un décalage entre le discours de Marine [Le Pen] et celui de la base militante, explique la jeune femme. Cette ambiguïté permanente, entre la vitrine et une arrière-boutique spécialisée dans les blagues vaseuses sur les Arabes et les homos, n'était plus supportable".

"PROPOS NÉONAZIS ET FASCISTES"

Certes, "tout le monde n'est pas à mettre dans le même panier", a-t-elle nuancé, mais, outre les militants, elle a mis aussi en cause le comportement de certains responsables départementaux du parti, sans les nommer. Un cadre du Front national de la Haute-Garonne lui aurait même lancé :"Toi et tes enfants, vous êtes bons pour le four."

"Je voulais être candidate sous mon nom de jeune fille : Djelida. On m'a vivement conseillé de privilégier mon nom d'épouse, allant même jusqu'à me dire que mon prénom était déjà presque un handicap."

Dans un courrier adressé à Mme Le Pen et publié par La Voix du Midi, Thierry Portheault fait également état chez certains militants et responsables de"propos néonazis et fascistes bien engagés et un dégoût des Arabes" ; il évoque un responsable se vantant du tatouage de croix gammée porté par son frère ou encore un autre responsable affirmant "qu'il déteste les homos et les Arabes", et de militants qui"disent qu'il faut tuer tous les Arabes".

PLAINTE EN DIFFAMATION

Selon le Front national, Mme Portheault, adhérente depuis 2012, s'était montrée comme son mari, ancien militant de l'UMP, une militante très zélée lors de la campagne présidentielle de Mme Le Pen. Et c'est "naturellement" que le Front lui avait accordé l'investiture et son soutien pour les municipales quand elle l'avait demandé.

Mais le secrétaire départemental du Front national, Julien Leonardelli, a catégoriquement rejeté les accusations du couple."Tous les membres de mon bureau, je les connais personnellement. Aucun d'entre eux n'est capable de tenir des propos aussi ignobles et inqualifiables", a-t-il affirmé, précisant avoir fait procéder à des vérifications au sein du parti.

Il a indiqué qu'une plainte en diffamation était en cours de formulation : les Portheault"devront répondre devant la justice et apporter des preuves de tout ce qu'ils avancent". Il a mis les accusations sur le compte de l'aigreur de M. Portheault de ne pas avoir un poste de responsabilité au sein du Front national, et sur le découragement de Mme Portheault devant les réalités d'une campagne municipale.

lundi 4 novembre 2013

A Saint-Denis, la bataille des collèges ZEP pour la mixité sociale 04.11.2013 à 14:46 | LE MONDE Aurélie Collas



Au collège Iqbal-Masih àˆ la Plaine Saint-Denis, le 23 septembre 2013. CAMILLE MILLERAND POUR LE MONDE

Scolariser ses enfants dans le collège ZEP de son quartier ? Nathalie Debotte n'y a jamais songé. Elle habite pourtant à deux pas. Comme bon nombre de Parisiens en quête d'un logement moins cher, cette directrice photo d'un magazine s'est installée à la Plaine Saint-Denis – le quartier du Stade de France et des studios de télévision, aux portes nord de Paris. Elle a troqué, il y a huit ans, son 40 m2 du 18e arrondissement contre un 150 m2. Fréquenter la petite école du secteur ne lui a pas posé de problème. Pour le collège, c'était une autre histoire.

Premier problème : la « mauvaise réputation » du collège. « Je n'ai rien vu de mes propres yeux, mais a priori, il y aurait pas mal de violence », rapporte cette mère de famille de 46 ans. Seconde crainte, celle de voir sa fille de 12 ans, bonne élève, être « tirée vers le bas ». « Je préfère que mes enfants soient moyens dans un bon collège, plutôt qu'excellents dans un mauvais. » Pour son aînée, son choix s'est porté sur un collège privé parisien. Les petits frères de– 9 ans et 7 ans  suivront le même chemin.

Ces nouveaux habitants de la Plaine – Parisiens trentenaires ou quadragénaires, classes moyennes voire « bobos » –, le collège Iqbal-Masih ne les voit pas frapper à sa porte. Il a pourtant belle allure, ce bâtiment de brique et de verre. Achevé en 1998, la même année que le Stade de France, il est sorti de terre quand la Plaine n'était encore qu'une vaste friche industrielle. Depuis, l'immobilier neuf a explosé ; les Parisiens sont arrivés, qui côtoient aujourd'hui encore une extrême pauvreté. Mais la mixité sociale du quartier n'a pas pénétré l'établissement. « De 70 % à 75 % de mes élèves sont socialement en difficulté, estimait Didier Georges, le chef d'établissement, à la rentrée. Les petits Parisiens, je les vois le matin sur le quai du RER en direction de Paris. Iqbal-Masih, c'est encore le collège qu'on évite. »

Sortir le collège de la ségrégation sociale dans laquelle il est enfermé : c'est le combat qu'a mené M. Georges ces dernières années. Ce sera aussi l'un des thèmes abordés lors des assises de l'éducation prioritaire, que le ministère de l'éducation nationale organise du 4 novembre au 4 décembre, et qui déboucheront sur une réforme annoncée en janvier.

UN TRIMESTRIEL À 2000 EXEMPLAIRES

Pour rendre son établissement plus attractif, pour changer son image –encore trop assimilée aux voitures brûlées et aux bagarres–, Didier Georges a misé, lui, sur une« offre d'excellence » : latin, grec, anglais renforcé, dispositif bilangue anglais-allemand, mais aussi classes théâtre et classes sport. Sans oublier la 3e « médias », qui publie un trimestriel tiré à 2 000 exemplaires. Dans certaines de ses spécialités, l'excellence est bien là : « L'an dernier, notre équipe de rugby féminin a remporté la 6e place au championnat de France, et l'équipe de foot masculin la 3e. On a aussi gagné le prix des journaux académiques », rapporte avec fierté le chef d'établissement.

Il en est convaincu : les options peuvent avoir un impact face à la concurrence du privé et à l'attrait de Paris. A condition d'en faire la publicité, d'être en prise avec le quartier. A condition, aussi, de ne pas recréer une ségrégation à l'intérieur du collège. A Iqbal-Masih – n'en déplaise aux parents–, pas de classes d'élite : les élèves qui suivent des options et les autres sont mélangés. « Le principe, c'est "pas de classe sans tête de classe", souligne Didier Georges. Dans chaque division, on essaie d'avoir au moins un tiers de bons élèves. »

>> Lire aussi l'entretien avec le chercheur François Baluteau : « Les collèges tendent à se spécialiser, ce qui renforce la ségrégation sociale »

La politique d'excellence en éducation prioritaire a une dizaine d'années. Elle repose sur le constat que trop souvent, les établissements défavorisés ne proposent que des options pour les élèves en difficulté ou en rejet de l'école, telles que les classes relais, les sections adaptées, les 3e de « découverte professionnelle ». Et qu'il faut miser sur des options qui attirent aussi les bons –– sections linguistiques, culturelles, sportives…. Or, dans un système où les déterminismes sociaux jouent à plein, ségrégation scolaire rime avec ségrégation sociale. Les bons élèves, dont les parents connaissent généralement bien les rouages de l'école, sont plus souvent issus de milieux favorisés. Inversement, les enfants originaires de catégories défavorisées ont plus de risques d'échouer. Cela se résume en un chiffre : près de 100 % des enfants de cadres supérieurs ou d'enseignants obtiennent le baccalauréat, contre seulement 40 % des fils ou filles d'ouvriers non qualifiés.

"NUMÉRO DE CLAQUETTES"

Pour rétablir l'égalité des chances, il n'y a pas d'autres moyens que de brasser les élèves, au sein des collèges, jusque dans les classes. « Au contact des élèves en réussite, ceux en difficulté observent et s'approprient des rituels de travail. Les premiers, en aidant leurs camarades, en transmettant leur savoir, sont également tirés vers le haut », assure François-Sébastien Demorgon, l'ancien principal du collège Garcia-Lorca, proche de la Plaine Saint-Denis (qui a rejoint, depuis la rentrée, l'inspection d'académie de Seine-Saint-Denis).« C'est tout le pari du collège unique ! »

Dans ce collège situé au cœur de la cité très pauvre des Francs-Moisins, enclavé entre l'autoroute et des usines, le défi de la mixité est de taille. Ici, près de 80 % des élèves sont issus de milieu social défavorisé. Pour éviter la fuite des premiers de classe de CM2 vers les collèges du centre-ville ou vers le privé, M. Demorgon faisait, chaque année, son « numéro de claquettes » dans les écoles pour parler aux familles de ses enseignements : option sciences, parcours bilangues anglais-allemand et anglais-arabe, 3e arts du cirque… « J'expliquais aux parents que si leur enfant était un bon élève, chez nous, il resterait bon. Qu'on allait développer son potentiel ; qu'on était en mesure de lui apporter plus que les enseignements obligatoires »,rapporte-t-il.

Garcia-Lorca est parvenu, en deux ans, à diminuer de moitié l'évitement du collège. Pour M. Demorgon, « l'image de l'établissement, qui dépend en partie des pôles d'excellence, a dû jouer ». Iqbal-Masih, lui aussi, semble avoir gagné en attractivité. En trois ans, le collège a enregistré une baisse de 5 % d'élèves issus de couches sociales défavorisées. Une amorce de mixité qui reste fragile. Les chefs d'établissement le savent bien : à la moindre bagarre, à la moindre descente de police, tout peut basculer. Car la première préoccupation des familles reste la sécurité, bien avant le taux de réussite au brevet.

« Ici, les gens évitent Iqbal-Masih sans même s'être renseigné, car ils disent qu'il y a trop de "racailles" »,soupire Florence Dupont, une habitante de la Plaine, qui travaille dans l'événementiel culturel. Elle se dit « démoralisée » de savoir que sa fille, en CM1 cette année, sera probablement l'un des seuls élèves de son école à fréquenter les bancs du collège Iqbal-Masih. « II y a quelques années, raconte-t-elle,dans une ville de Seine-Saint-Denis, un groupe de parents, du profil classes moyennes supérieures, s'est mis d'accord pour mettre leurs enfants dans le collège public de leur secteur. Tout s'est bien passé et les enfants y ont fait toute leur scolarité. » Florence Dupont rêve de fédérer un tel mouvement.