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mardi 21 février 2012

"Halal" et "carton rouge", les nouveaux gimmicks de campagne de Marine Le Pen Le Monde | 21.02.12 | 08h09 • Mis à jour le 21.02.12 | 08h09


LILLE ENVOYÉ SPÉCIAL - Reprendre la main en provoquant une polémique. C'est ce que Marine Le Pen a cherché à faire en déclarant, lors de la convention présidentielle de son parti, qui s'est tenue à Lille samedi 18 et dimanche 19 février, que "l'ensemble de la viande (...) distribuée en Ile-de-France, à l'insu du consommateur, est exclusivement de la viande halal".

"Tous les abattoirs d'Ile-de-France vendent du halal, sans exception. Que du halal",a-t-elle ajouté. Elle a également annoncé sa volonté d'agir en justice au motif d'une"tromperie sur la marchandise" contre des enseignes de la grande distribution.

Cette sortie de Mme Le Pen semble très préparée. Elle l'avait d'abord annoncée lors d'une table ronde samedi après-midi. Mais, pour être sûre que son message arrive bien jusqu'aux médias, elle a également pris soin de le répéter aux représentants de la presse écrite lors d'un rendez-vous qui n'était pas prévu initialement.

Pour Mme Le Pen, lancer le débat autour du halal revêt plusieurs avantages. Alors que les intentions de vote en sa faveur semblent se tasser, ses déclarations ont l'avantage d'attirer la lumière sur elle et de susciter moult réactions. Dimanche 19 février, le gouvernement - par la voix, entre autres, du ministre de l'intérieur Claude Guéant - et les professionnels de l'alimentation et de la viande se sont succédé devant les micros pour corriger ou réfuter les affirmations de Marine Le Pen.

Ensuite, le sujet lui permet de faire coup double vis-à-vis de sa base. Celle-ci réagit généralement au quart de tour sur ce qui a trait de près ou de loin et à l'islam. Mais aussi à la grande distribution, une des cibles favorites de la candidate du FN. Enfin, la candidate du parti d'extrême droite entend montrer que M. Sarkozy, qui veut fairecampagne sur certains thèmes du FN, ne va pas aussi loin qu'elle et qu'il "enfume"les électeurs, selon le terme de Mme Le Pen.

Un pays "trahi, trompé"

Heureux hasard, les affirmations polémiques sur le halal ont permis de faire passerau second plan la controverse née après que Jean-Marie Le Pen eut cité, deux heures auparavant, un poème de Robert Brasillach, écrivain collaborationniste et antisémite.

Bizarrement, lors de son discours de clôture de cette convention, Mme Le Pen n'a qu'effleuré la question du halal. Elle a alors concentré ses attaques sur le chef de l'Etat, qu'elle considère comme son adversaire principal lors du premier tour de la présidentielle. Parfois, en des termes très durs. Comme lorsqu'elle l'a qualifié de"candidat de la France morte".

Mme Le Pen a aussi fait brandir des cartons rouges - nouveau gimmick de communication de la candidate - aux militants présents dans la salle, pour signifierau chef de l'Etat qu'il était plus que temps pour lui de partir. Les sympathisants de la candidate ont ensuite crié "Dehors ! Dehors !", à plusieurs reprises.

Et quand Mme Le Pen a fait le bilan du quinquennat qui s'achève, son propos fut sans appel. "Sarkozy devenu (...) le candidat du peuple, c'est une insulte à l'intelligence de ce même peuple (...), l'ultime marque de mépris d'une présidence ratée", a-t-elle lancé. Une présidence si ratée que la France en sort, selon Mme Le Pen, "volée, trahie, trompée".

Abel Mestre

lundi 20 février 2012

Conférence de Gilles Manceron le jeudi 1er mars à l'Espace St Michel à Paris, "La marche vers l'indépendance: les difficiles coexistences en Algérie et en France (1945-1962)"




PlaNet DZ

et le

Forum France-Algérie

présentent


le jeudi 1er mars


"La marche vers l'indépendance: les difficiles coexistences en Algérie et en France (1945-1962)"

avec

Gilles Manceron

Historien et membre de la Ligue des droits de l'Homme


Le rencontre est organisée dans le cadre du cycle de conférences engagé en 2008  par Planet DZ et destiné à rassembler un maximum d'éléments de connaissance et de compréhension des évènements et des situations qui ont, de 1830 à nos jours, forgé la relation actuelle, si complexe, entre l'Algérie et la France.


Espace Saint Michel

7, place Saint Michel - 75005 Paris

Accueil à 18h30 et conférence de 19h à 21h

Participation aux frais: 3 €



Prochaine conférence - Réservez la date 


Mercredi 7 mars (à confirmer)



"Le rôle des femmes algériennes et françaises

dans la guerre d'Indépendance"



Les news du Forum France Algérie
Inscriptions/désinscriptions: envoyer message à contact@forumfrancealgerie.org











dimanche 12 février 2012

Le Pen fustige le bilan de Sarkozy sur l'immigration et la laïcité 12.02.12 | 19:53 | LEMONDE.FR Abel Mestre

Marine Le Pen veut être la candidate de "la République une et indivisible". En meeting à Strasbourg, dimanche 12 février, la candidate du Front national à l'élection présidentielle, a martelé son message anti-immigration et anti-islam, sous couvert de défense de la laïcité.

Le thème de son discours (immigration, laïcité, sécurité ) était"prévu de longue date", selon le FN. Bien avant les déclarations de Nicolas Sarkozy au Figaro Magazine du 11 février qui font présager une campagne du chef de l'état sur les thématiques frontistes. Alors, Mme Le Pen en a profité pour attaquer le bilan de M. Sarkozy, comme elle le fait désormais chaque semaine dans ses meetings.

"L'immigration, ce sera, paraît-il, un des sujets au coeur de la campagne de notre vrai-faux candidat, Nicolas Sarkozy. Il paraît que ce cher M. Sarkozy a décidé de faire quelque chose contre l'immigration", s'est moquée Mme Le Pen, avant de citer différentes déclarations du chef de l'Etat à ce sujet. "Ils pensent qu'ils peuvent refaire le même coup sans cesse, indéfiniment, dans une impunité totale dont on sait que c'est la spécialité des récidivistes et même des multi-récividivistes", a aussi lancé Mme Le Pen, faisant allusion à l'élection présidentielle de 2007 où Nicolas Sarkzoy avait réussi à capter un certain nombre de suffrages chez les électeurs du FN, en mettant en avant la sécurité et l'immigration.

Mme Le Pen n'a pas eu peur d'en rajouter. Comme lorsqu'elle évoque, encore une fois, les promesses de M. Sarkzoy en matière d'insécurité. "Nicolas Sarkozy nous avait promis de sortir le glaive (...). Il nous a montré une ridicule épée en plastique. Celle qu'on offre aux petits garçons qui se prennent pour des super-héros", a-t-elle déclaré devant une salle de 2 000 personnes pratiquement pleine. "M. Sarkozy utilise l'immigration comme un thème électoraliste. (...) Il se trompe lourdement, l'immigration n'est pas un thème de campagne, mais une impérieuse nécessité. (...) Je veux défendre notre culture, notre civilisation (....) notre identité", a-t-elle insisté, en déclarant que "le seuil de tolérance[avait] été atteint depuis bien longtemps en matière d'immigration".

"L'ISLAM DEVRA S'ADAPTER À LA LAÏCITÉ"

Immigration et insécurité sont deux sujets liés pour Mme Le Pen, pour qui "si l'insécurité progresse, c'est que l'immigration monte". Alors, les solutions contre l'immigration passer de 200 000 entrées par an à 10000 ; l'asile divisé par cinq en cinq ans, fin du regroupement familial ; rétablissement de la double peine ; fin des régularisations et suppression du droit du sol sont censées régler le problème de l'insécurité. Mme Le Pen plaide aussi pour la fin des remises de peine automatiques et une réorientation en faveur des victimes comme avec leur présence lors des commissions de remises de peines.

Enfin, dernier chapitre du triptyque lepéniste : la laïcité. Pour Mme Le Pen, celle-ci est un argument tourné exclusivement contre l'islam. Elle relativise l'intégrisme dans d'autres religions. "Je veux la pleine application de la loi de 1905, quelle que soit la religion (...). L'islam devra s'adapter à la laïcité", a-t-elle affirmé. Imitant ses détracteurs et leur répondant dans un dialogue imaginaire, elle a lancé : "'Mme Le Pen, vous êtes une fausse laïque (...) parce que vous parlez du fondamentalisme islamique'. Je parle de la réalité, des problèmes qui existent aujourd'hui en France. On me répète en général 'Regardez St-Nicolas-du-Chardonnet'. Je n'ai jamais entendu que St-Nicolas-du-Chardonnet allait effectuer des pressions ou des menaces pour chercher à faire changer la loi de la République. Je n'ai pas entendu que les juifs exigeaient d'avoir des revendications religieuses. Je n'ai pas entendu que l'on avait des problèmes avec les protestants qui exigeaient ceci ou cela. Le problème aujourd'hui c'est le problème de ceux qui exigent au nom du fondamentalisme islamique."

L'église St-Nicolas-du-Chardonnet, dans le Ve arrondissement de Paris, est un lieu de culte accaparé depuis plus de trente ans par des militants intégristes de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie-X, créée par l'évêque schismatique Marcel Lefebvre. Elle appelle régulièrement manifester contre la loi autorisant l'IVG, dont elle demande l'abrogation, et a été récemment en première ligne dans les manifestations devant le Théâtre de la Ville et celui du Rond-Point, à Paris, pourl'interdiction de pièces de théâtre jugées par elle blasphématoires. Par ailleurs, y sont célébrées chaque année des messes à la mémoire de Franco et Primo de Rivera. Mme Le Pen, qui n'est pas elle-même une catholique intégriste, a décidé de ménager ce courant de l'extrême droite dans sa campagne présidentielle.

Brocardant François Hollande et Nicolas Sarkozy, qui "ont des bras tout mous" face à "l'islamisme", Mme Le Pen s'est une nouvelle fois autoproclamée seule candidate défendant la laïcité, dénonçant particulièrement le voile islamique. Ces propos très virulents ont en tout cas chauffé à blanc la salle, très réactive sur ces thèmes. Comme cet homme qui a lancé un tonitruant "Dehors les melons !" à ce moment du discours, qui dura au final près d'une heure et demie.

De même qu'à Rouen, en janvier, la présidente du Front national a réaffirmé l'héritage "chrétien de la France". Elle a exposé, pour ceux qui ne seraient "pas contents" des mesures qu'elle propose, comme l'interdiction du Halal dans les cantines scolaires, que la cantine"n'est pas obligatoire" et que les écoles privées existent. S'exprimant sur le Concordat, en vigueur en Alsace et en Moselle, elle s'est dite opposée à son extension à l'Islam.



samedi 11 février 2012

La polémique Guéant s'invite au cinquantenaire des événements du 8 février 1962 08.02.12 | 19:09 | LEMONDE.FR Delphine Roucaute


Sept cent personnes se sont réunies, mercredi 8 février, à l'appel de la CGT au métro Charonne pour commémorer le cinquantenaire de la manifestation du 8 février 1962. Ce jour-là, neuf syndicalistes ont trouvé la mort au terme d'une manifestation violemment réprimée par la police. Le rassemblement avait pour objet de dénoncer la guerre en Algérie et les agissements violents de l'Organisation armée secrète (OAS).

Cinquante ans après, Charonne est devenu, pour les syndicalistes, le symbole de la lutte pacifiste contre un Etat aveuglé par son idéologie. Un Etat qui encore aujourd'hui ne reconnaît pas la responsabilité qu'il a eue dans la mort de ces neuf personnes. 

"Au-delà du devoir de mémoire, nous sommes ici aujourd'hui pour demander à l'Etat de reconnaître sa responsabilité. Jusque-là, nos lettres sont restées sans réponse", déclare Daniel Renard, le président du comité "Vérité et justice pour Charonne". Un silence officiel à l'image de celui qui pèse sur la répression de la marche pacifiste du FLN, le 17 octobre 1961.

L'intersection entre la rue de Charonne et le boulevard Voltaire a bien été rebaptisée "place-du-8-Février-1962" en 2007, mais à la seule initiative du maire de Paris, Bertrand Delanoë, pour qui "sans courage de la vérité, il n'y a pas de civilisation digne de ce nom".

LA "XÉNOPHOBIE D'ÉTAT"

"Civilisation", le terme est dans tous les esprits depuis les déclarations, le 4 février, de Claude Guéant, qui ont provoqué un tollé : "toutes les civilisations ne se valent pas", avait avancé le ministre de l'intérieur. Des propos vivement critiqués mercredi par diverses personnalités participant à la commémoration. Pierre Laurent, le secrétaire national du PCF, n'a pas manqué de dénoncer la"xénophobie d'Etat" actuelle. Pour lui, "l'indigne provocation de Claude Guéant est un nouvel et consternant épisode" de la réécriture de l'histoire mise en oeuvre par le gouvernement du président Sarkozy.

Même constat pour Bertrand Delanoë, qui déclare que "ces dernières années ont accru les inquiétudes sur l'identité""Un peuple est grand quand il se regarde en face, et qu'il regarde l'autre en face", plaide-t-il, en invoquant l'image de Willy Brandt s'agenouillant devant le mémorial du ghetto de Varsovie, en 1970."Mais je ne veux pas faire d'amalgame", prévient-il. L'assistance sourit à ce clin d'oeil aux déclarations de Serge Letchimy.

DEVOIR DE MÉMOIRE

Le cortège s'est ensuite déployé jusqu'au cimetière du Père Lachaise, là où sont enterrées les victimes de la répression policière de 1962. Dans la foule, Isy, militant communiste depuis 1951. Il était sur les lieux de l'altercation, juste avant que les policiers ne chargent. Il rappelle : "Vous vous rendez compte : l'OAS s'est attaquée au ministre de la culture, André Malraux [visé par un attentat le 7 février 1962]. On ne pouvait pas laisser passer ça."

Pour lui, ce qu'il faut retenir, c'est la lutte pacifiste que voulait engager le PCF contre le terrorisme de l'OAS. "Aujourd'hui, je suis là avant tout pour honorer les morts, et cet événement qui fait partie de mon histoire personnelle. Certes, le discours du gouvernement actuel fait penser à celui d'hier. Mais il faut surtout penser aux morts", confie-t-il.


jeudi 9 février 2012

Les ambiguïtés de l'immigration " intelligente " du candidat Hollande - ANALYSE Le Monde 10 février 2012






Le concept " d'immigration intelligente ", lâché de façon un peu impromptue par François Hollande, jeudi 27 janvier, à l'occasion du débat qui l'opposait à l'ancien premier ministre Alain Juppé sur le plateau de l'émission " Des paroles et des actes ", sur France 2, ne cesse d'interroger, depuis, tous ceux qui s'intéressent à la question migratoire en France.

Dit avec l'air bonhomme de M. Hollande, ce beau mot est d'abord apparu nettement moins clivant que les concepts d'immigrations " choisie " ou " subie ", développés par Nicolas Sarkozy en 2007. Mais au regard du programme du candidat socialiste sur l'immigration, constitué en tout et pour tout de quatre phrases et sept lignes, il est aussi venu mettre en exergue la malléabilité de l'adjectif.

Sur le plan du discours, certes, la ligne semble claire : M. Hollande " n'aura pas besoin de stigmatiser pour parler immigration ", assure Mireille Le Corre, en charge du pôle " immigration-intégration " dans l'équipe de campagne du candidat socialiste. La volonté de M. Hollande d'accorder le droit de vote aux élections locales aux étrangers devrait l'obliger, effectivement, à adopter un ton plus consensuel que Nicolas Sarkozy.

Cette proposition d'ordre surtout symbolique se trouve toutefois contrebalancée par une position plus rigide sur la " lutte contre l'immigration irrégulière ". Le candidat socialiste la décrit dans son programme comme " implacable ". Des accents sécuritaires nouveaux dans sa bouche, qui n'ont rien à envier à ceux de la majorité et dénotent une volonté d'éviter les procès en angélisme tout en rassurant l'électorat le moins libéral sur ce thème. " Il n'y aura pas d'objectifs chiffrés " mais " il y aura des éloignements - des expulsions - ", défend ainsi Mme Le Corre, en prononçant un mot que peu de socialistes se risquent à lâcher alors que beaucoup, dont M. Hollande, ont longtemps dénoncé la brutalité de cette procédure. A ce titre, aucune proposition d'aménagement de la très polémique " rétention administrative " n'apparaît non plus dans son programme.

" Au cas par cas "

La proposition de " régulariser " les étrangers en situation irrégulière " au cas par cas sur la base de critères objectifs ", témoigne du même exercice d'équilibrisme. Le " cas par cas " est aujourd'hui la règle appliquée par toutes les préfectures. C'est elle qui donne lieu à l'" arbitraire " tant dénoncé par les associations.

Mais pour ménager à l'inverse, les inquiétudes de son électorat le plus humaniste, M. Hollande propose dans le même temps des critères " objectifs " à ce traitement. Ces critères reposeront sur " la durée de résidence, le lien avec l'emploi et les attaches familiales, notamment la scolarisation des enfants ", détaille Mme Le Corre. Mais, là encore, ce sont déjà ces critères qui sont pris en compte par les préfectures.

L'enjeu, si M. Hollande est élu, résidera donc dans le degré de précision de ces paramètres. Ce sont eux qui permettront - ou pas - une régularisation " large ", comme l'appelait de ses voeux le Parti socialiste dans sa dernière motion sur l'immigration adoptée en novembre 2009. Le mot a disparu du vocabulaire lors des primaires de 2011.

L'ambiguïté demeure enfin, dans le programme de M. Hollande, sur ce qui constitue pourtant, aujourd'hui, le coeur des difficultés des nouveaux immigrés en France : la politique des titres de séjour. En raison de leur durée limitée (généralement un an renouvelable), ils maintiennent éloignés des bons logements et du crédit leurs titulaires et renforcent les concentrations dans les quartiers défavorisés.

Sur ce sujet, le candidat socialiste se contente d'annoncer qu'il " sécurisera " l'immigration légale. Reprendra-t-il, plus tard, les propositions de son porte-parole Manuel Valls qui prônait encore, à l'automne, l'instauration de cartes de cinq ans et dix ans renouvelables automatiquement ? Rien ne le dit. L'immigration c'est la mondialisation, et sur ce dernier sujet, le candidat Hollande, pour l'heure, apparaît toujours tenté par le protectionnisme.

E. V.


Migrations : la communication choisie de M. Guéant - Le Monde 10 février 2012 -



Le rapport annuel sur les titres de séjour des étrangers contredit les annonces précédentes du ministre de l'intérieur





C'est en toute discrétion que le ministère de l'intérieur a rendu public le rapport annuel qui contient les derniers indicateurs " officiels " des flux migratoires en France. II y a un mois, le 10 janvier, Claude Guéant avait pourtant dévoilé en grande pompe " ses " chiffres de l'immigration, qui ne concernaient que l'année 2011 (Le Monde du 11 janvier).

Le rapport annuel, mis en ligne sur le site de La Documentation française, donne à voir des tendances différentes de celles annoncées en début d'année. Il permet aussi de dresser un premier bilan de quatre années du quinquennat de Nicolas Sarkozy. Mais, pour sa sortie, la Place Beauvau a préféré, cette fois, s'abstenir de toute communication. C'est par Twitter et des abonnés proches du Front national (FN) que la nouvelle a circulé, sur la Toile, mercredi 8 février.

L'attitude du ministère de l'intérieur a sa logique. Ce document annuel sur les " orientations de la politique de l'immigration et de l'intégration " dévoile les chiffres de l'année 2010. Alors qu'en janvier, la Place Beauvau avait, elle, dévoilé les chiffres de 2011 : une première - il y a d'ordinaire toujours un an de décalage entre le rapport et les statistiques consolidées.

Ces annonces des chiffres de l'immigration faites avec un an d'avance répondaient pour le ministère à un calcul politique précis. La baisse de l'immigration légale souhaitée par le ministre de l'intérieur, Claude Guéant, en avril 2011, n'aurait en effet pas été visible dans les statistiques si le protocole habituel de publication des chiffres avait été respecté. De même, pour différentes raisons, un certain nombre d'indicateurs ne pouvaient être communiqués sous un jour " favorable " au ministère que s'ils concernaient 2011.

Début janvier, M. Guéant s'est ainsi vanté d'avoir fait baisser de 3,6 % le nombre total de premiers titres de séjour délivrés entre 2010 et 2011. Or, à l'inverse, entre l'année 2009 et 2010, selon le rapport, ce nombre avait augmenté de 0,8 %, en passant de 198 070 à 199 715. Une tendance qui se vérifie sur le long terme : + 7,4 % depuis 2007.

En matière d'immigration de travail, M. Guéant s'est aussi fait fort, début janvier, d'annoncer une baisse de 26 % des entrées entre 2010 et 2011. Mais, entre 2009 et 2010, d'après le rapport, celles-ci n'avaient baissé, pour les ressortissants des pays extra-européens, que de 7,4 %, en passant de 19 251 à 17 819, tandis qu'elles avaient augmenté de 11 % pour ceux issus des nouveaux Etats membres de l'Union européenne en passant de 4 508 à 5 007. Sur le long terme, la hausse est aussi importante pour les extra-Européens : + 51 % depuis 2007.

Les écarts d'affichage sont également notables sur la baisse annoncée, en janvier, de 14 %, entre 2010 et 2011, de l'immigration pour " liens personnels et familiaux " des extra-Européens. Entre 2009 et 2010, ces mêmes " liens personnels et familiaux " avaient augmenté de 0,8 % en passant de 17 360 à 17 514. Depuis 2007, l'ensemble de l'immigration familiale a certes bien baissé, mais de seulement 6 % en passant de 87 537 à 82 235.

Un autre décalage de communication concerne les naturalisations. Alors que M. Guéant a annoncé une baisse de ces dernières de 30 % entre 2010 et 2011, celles-ci, révèle le rapport, avaient augmenté entre 2009 et 2010 de 7,5 %, passant alors de 108 303 à 116 496. Une variation qui s'explique par le précédent choix de la majorité d'encourager les naturalisations au motif qu'elles favorisaient " l'intégration ".

Le durcissement d'aujourd'hui sur les naturalisations - qui devrait se poursuivre au vu des nouvelles consignes du ministère (Le Monde du 13 janvier) - sert un autre but. Celui de faire baisser les entrées en France de " conjoints de Français ", principalement originaires du Maghreb. Ces derniers représentent en effet l'essentiel de l'immigration familiale en France.

En matière de reconduites à la frontière, le rapport rendu au Parlement montre aussi qu'entre 2009 et 2010 celles-ci avaient baissé de 4,4 % passant de 29 332 à 28 026. Contrairement au discours d'extrême fermeté affiché à l'époque, particulièrement à la suite du discours de Grenoble de l'été 2010, le système d'éloignement des étrangers en situation irrégulière était alors en fait entravé par l'essor d'une jurisprudence favorable aux étrangers et l'inflation du contentieux.

C'est seulement à partir de juin 2011, grâce à la nouvelle loi sur l'immigration qu'a adoptée la majorité, que le gouvernement s'est doté d'un arsenal juridique lui permettant d'inverser cette tendance. D'où l'intérêt pour M. Guéant de communiquer, en janvier, sur les chiffres de 2011. Il a alors pu dévoiler le record de 32 000 reconduites à la frontière.

Reste la question des régularisations. Traditionnellement, dans le rapport annuel, il existe une ligne statistique qui permet de connaître leur nombre approximatif. Celui-ci tourne généralement autour de 30 000. Cette année, cette ligne est située page 72 du rapport. Mais pour la première fois, la case n'est pas renseignée.

Elise Vincent


mardi 7 février 2012

Le sondage UMP qui fait scandale !


Le 06/02/2012 - 

Réagissez !Planet.fr

Dans le cadre des ses "Questions de la semaine" visant à interroger ses sympathisants, le site de l'UMP a posé la semaine dernière une question qui a fait scandale... 

Etait-elle trop orientée ? Trop stigmatisante ? Planet.fr vous donne tous les détails.

Chaque semaine, le site internet de l'UMP sonde ses visiteurs sur différents thèmes. Mais la question posée la semaine dernière a créé le scandale, liant sans détour l'immigration et la délinquance.

Les internautes qui ont visité cette page du site ont dû répondre à la question suivante : "Pour lutter plus efficacement contre les actes de délinquance commis par une frange de la population qui a fait de la violation de la loi pénale son mode habituel de vie, doit-on expulser les étrangers auteurs de tels faits ?"

"La stigmatisation des étrangers"
Très rapidement, SOS Racisme a tenu à réagir : "En faisant très clairement le lien entre délinquance et immigration, cette question est de celles qui participent de la stigmatisation des étrangers", avant d'ajouter "Nous espérons que l'UMP ne se lance pas, en tant que parti, dans cette course folle vers une démagogie haineuse et que cette question n'est qu'on 'loupé' qui ne se reproduira pas".

Et vous, qu'en pensez-vous ?

Question de la semaine UMP - lien immigration délinquance

Petites phrases de Guéant

http://www.planet.fr/dossiers-de-la-redaction-claude-gueant-toutes-les-civilisations-ne-se-valent-pas-et-autres-petites-phrases-du-genre.163007.1466.html?xtor=ES-1-161605[Planet-a-Une]-20120207

lundi 6 février 2012

"Toutes les civilisations ne se valent pas". Comme les races autrefois...




Une tribune d'Esther Benbassa parue dans leHuffington Post le 6 février 2012. 

Le XIXe siècle et le début du XXe siècle se sont nourris de pseudo-théories scientifiques sur les différences entre les races, permettant de les situer sur une échelle. Maintes "recherches" visaient à prouver cette hiérarchie avec sérieux et rigueur. La forme des crânes et la taille supposée des cerveaux valaient preuves. Reprises, déclinées, amplifiées par les Nazis, ces divagations leur permirent de placer la race aryenne tout en haut, et la "race" juive - il n'y en eut évidemment jamais - tout en bas. Cette dernière, dont la nocivité était démontrée, devait disparaître, pour laisser la place aux races supérieures, parties à la conquête de l'Europe. On connaît la suite : l'extermination des membres de cette prétendue race inférieure dans les camps de la mort.

Nous, historiens, savons très bien que les "leçons de l'histoire" ne hantent guère la mémoire de la plupart de nos politiciens. Elles n'y affleurent même pas. Ils préféreront toujours mettre en exergue leur pragmatisme et leur professionnalisme. Comme si la politique était une profession.

Dernier exemple en date, notre cher ministre de l'Intérieur, Claude Guéant, qui n'est pas à une polémique près, déclarait, le samedi 4 février, lors d'un colloque organisé par l'association étudiante de droite dure, l'UNI, à l'Assemblée nationale, que "toutes les civilisations ne se valent pas" et appelait, en bonne logique, à "protéger notre civilisation". Il récidivait le lendemain sur France Inter : "toutes les civilisations, toutes les pratiques, toutes les cultures, au regard de nos principes républicains, ne se valent pas ». Bien qu'affirmant qu'il ne visait aucune religion en particulier, il donnait deux exemples de pratiques non acceptables évoquant l'islam, le voile intégral et les prières de rue.

Jusqu'à quand stigmatisera-t-on aussi grossièrement les musulmans ? M. Guéant, qui prétend s'exprimer au nom des Français, juge qu'"il y a des civilisations que nous préférons, (...) pour nous, tout ne se vaut pas". Il n'ose pas utiliser le mot "religion". Mais c'est clairement à cela que son "civilisation" renvoie. C'est même de cette confusion qu'il joue. Or, tout esprit un peu sensé sait que toutes les civilisations, que toutes les religions si diverses qu'elles soient se valent. Elles peuvent enfanter le pire, comme le meilleur. L'Europe et le christianisme ont été riches en exemples des deux sortes. Seuls les régimes politiques, les organisations sociales ne se valent pas, en effet.

Le jeu pervers auquel se livre Claude Guéant fait froid dans le dos. Il s'agit certes pour lui d'aller à la pêche aux voix du Front National pour son patron, maintenant que Marine Le Pen rencontre des difficultés à rassembler ses 500 signatures et qu'un sondage publié dimanche montre que si elle n'était pas dans la course, Nicolas Sarkozy et François Hollande seraient à égalité au premier tour.

Voilà qui donne des ailes à la droite pour tenter de séduire sans vergogne l'électorat du FN. Et qui autorise M. Guéant à reprocher aux socialistes de ne pas être assez laïcs et de tolérer "une civilisation qui asservit la femme, qui bafoue les libertés individuelles et politiques, qui permet la tyrannie". Rien que ça.

Comment supporter cette surenchère politique d'inspiration bassement xénophobe, qui fait son chemin dans les esprits, et y instille jour après jour la haine du musulman ? Qui veut-on donc convaincre de cette inégalité des civilisations et finalement pour quoi faire ? A supposer que les musulmans appartiennent à une civilisation "inférieure", M. Guéant peut-il nous dire clairement ce qu'il entend en faire ? A-t-il conscience que l'accumulation des petites phrases assassines ne peut, inéluctablement, que mener à la violence ?

Monsieur Jourdain de l'anthropologie, notre ministre de l'Intérieur, enfermé dans son bureau, l'œil rivé à la lorgnette de son cynisme électoraliste, devise et théorise sur les bonnes et les mauvaises civilisations. Quelle honte pour la France d'être dirigée par des politiciens sans éthique, prêts à sacrifier la cohésion nationale et notre capacité à vivre ensemble sur l'autel de leurs petits intérêts à court terme ! A quand « La France aux Français » ?

Esther Benbassa est directrice d'études à l'EPHE (Sorbonne) et sénatrice EELV du Val-de-Marne. Elle vient de publier De l'impossibilité de devenir français (Les Liens qui Libèrent, 2012).

Affaire Guéant : Juppé «regrette» l'utilisation du mot «civilisation»



Affaire Guéant : Juppé «regrette» l'utilisation du mot «civilisation»

RÉCITLe ministre de l'Intérieur a déclaré lors d'une rencontre entre des élus UMP et l'UNI, syndicat étudiant proche de la droite radicale, que «toutes les civilisations ne se valent pas». Les réactions ont été multiples.

5519 commentaires

Par CHRISTIAN LOSSON

Claude Guéant, le 10 janvier à Paris. (Photo Vincent Nguyen. Riva Press)

Il persiste. Le ministre de l'Intérieur Claude Guéant a affirmé dimanche sur RTL qu'il «ne regrette pas» sa déclaration de samedi sur l'inégalité des civilisations.

«Mais je regrette que certains à gauche continuent à extraire des petites phrases de leur contexte et enlèvent ainsi la dignité du débat démocratique», a déclaré le ministre, qui avait dit samedi devant des étudiants que «toutes les civilisations ne se valent pas».

Ce sont ces deux phrases - «Nous devons protéger notre civilisation» et«Contrairement aux socialistes, je pense que toutes les civilisations ne se valent pas» - prononcées par Claude Guéant samedi et qui ont suscité l'indignation à gauche.

Ces propos, rapportés par un site internet lié à une école de journalisme de Paris, « Fréquence ESJ », ont été tenus samedi à l'Assemblée nationale lors d'une réunion à huis clos avec le syndicat étudiant UNI, lié à la droite radicale.

Précisément, voilà les propos tenus par le ministre de l'Intérieur : «Contrairement à ce que dit l'idéologie relativiste de gauche, pour nous, toutes les civilisations ne se valent pas. Celles qui défendent l'humanité nous paraissent plus avancées que celles qui la nient. Celles qui défendent la liberté, l'égalité et la fraternité, nous paraissent supérieures à celles qui acceptent la tyrannie, la minorité des femmes, la haine sociale ou ethnique». «En tout état de cause, nous devons protéger notrecivilisation», a conclu Guéant.

Dimanche, Guéant a tenu à préciser. «Cela veut dire très clairement que, pour nous, tout ne se vaut pas. Pour la gauche, apparemment, si j'en juge par les réactions que j'ai entendues ce matin, tout se vaut», a ajouté Guéant.

Interrogé pour savoir si «notre civilisation était inférieure» quand la France n'accordait pas le droit de vote aux femmes (avant 1945) ou pratiquait la peine de mort (avant 1981), le ministre de l'Intérieur a répondu: «je dis très clairement qu'elle était inférieure à ce qu'elle est aujourd'hui».

«Provocation pitoyable»

Parmi les premières réactions politiques, via twitter, celle de Harlem Désir, numéro 2 du PS:

 

L'un des membres du cabinet de Guéant justifie ainsi la sortie de son ministre:

Claude Bartolone, député PS, a notamment déclaré dimanche dans un communiqué: «Les mots choisis font froid dans le dos. Il est pathétique de voir un ministre de la République faire les poubelles des Le Pen pour ramasser quelques voix. En temps de fragilité sociale, il est des mots avec lesquels on ne joue pas.»

Pierre Moscovici, député PS : «C'est un geste prémédité, volontaire, conscient (...) et qui a été sûrement couvert par l'Elysée. Il serait bon que M. Sarkozy s'en désolidarise (...) mais il ne le fera pas parce qu'il est en campagne», a déclaré le directeur de campagne de François Hollande sur LCI. «Cela n'a pas été fait par hasard. J'en suis persuadé» et le ministre de l'Intérieur, par ses propos, cherche à créer des «passerelles entre la droite et l'extrême droite», selon le député du Doubs.

M. Guéant, «en vérité, vise les musulmans, il vise l'islam. C'est écrit en gros et cela est de nature à casser la mécanique républicaine», s'est inquiété M. Moscovici.

Jean-Christophe Cambadélis, député PS, réagit sur son blog: «De tous temps, sous le Monsieur Guéant, aimable, affable, de commerce agréable, bout un idéologue d'une droite dure décomplexée (…) Arrêtons de dire qu'il drague les voix du FN (….) Il n'avait pas l'intention de lancer un appel. C'est bien pire, c'est ce que Monsieur Guéant pense. (…) Il s'agit au travers d'un glissement sémantique, apparemment anodin, de stigmatiser sous le vocable +civilisation+, l'Islam censé être inférieur… C'est le lointain échos du discours de Dakar. C'est le différentialisme culturel cher à la Nouvelle droite (…)»

Bernard Cazeneuve, député PS et porte-parole de François Hollande, dénonce dans un communiqué: «Théoriser le conflit des civilisations, c'est diviser et abaisser la République (…) Claude Guéant révèle une fois encore la dérive d'une droite en perdition, prête à tous les abandons pour préempter le fonds de commerce du Front National. L'amour de la démocratie et de la liberté doit interdire à tout républicain d'établir une quelconque hiérarchie dans l'humanité.»

Les jeunes socialistes se sont, eux, fendus d'un communiqué. "Claude Guéant se range dans la catégorie de ceux qui différencient et hiérarchisent les hommes, permettant le basculement vers un véritable racisme culturel",assurent les  jeunes pousses PS. "Dakar, Grenoble, les campus UMP et maintenant les conventions de l'Uni, la surenchère permanente, dans la division et la haine de l'autre, est écœurante."

De son côté, Cécile Duflot, secrétaire nationale d'Europe-Ecologie Les Verts, évoque un «retour en arrière de trois siècles».

«Ce qui est visé, c'est l'islam»

Ségolène Royal a dénoncé dimanche «un dérapage contrôlé et parfaitement volontaire». «Ce sont des propos obscurantistes et dangereux, parce que derrière le choc des civilisations, il y a la guerre», a fait valoir l'ancienne candidate PS à la présidentielle, invitée de 12/13 Dimanchesur France 3.

«Est-ce que nous voulons la guerre? Non, donc nous ne voulons pas le choc des civilisations et ce que nous voulons c'est défendre les mêmes valeurs universelles. Dans toutes les civilisations, il y a des valeurs communes, celles que l'on retrouve dans les dix commandements: on ne tue pas, on respecte son voisin…», a poursuivi la présidente de la région Poitou-Charentes.

Elle a estimé que le ministre de l'Intérieur avait fait «un dérapage contrôlé et parfaitement volontaire, qui porte atteinte à l'image de la France».

Pour Royal, «il faut faire très attention à la manière dont les ministres s'expriment parce qu'ils ne représentent pas que l'UMP ou leur petite personne, mais ils s'expriment aussi d'une certaine façon au nom de la France». «Lorsque les autres civilisations entendent ce que dit un responsable français, c'est dégradant pour la France parce que la France est le pays des droits de l'Homme, de la révolution française, de la liberté, de l'égalité et de la fraternité et il se trouve qu'aujourd'hui (…) les peuples ont la même aspiration, à la liberté, à l'égalité, à la fraternité et au bien-être», a conclu Royal.

Dominique de Villepin, candidat à l'élection présidentielle 2012 et ancien ministre de l'Intérieur, a estimé dimanche sur Forum Radio J que Claude Guéant avait abordé un «sujet un peu glissant» qui faisait «courir le risque d'alimenter les haines».

«Aller situer dans une hiérarchie les civilisations les unes par rapport aux autres, c'est courir le risque d'alimenter un certain nombre d'idées reçues, de haines, de méconnaissance de l'autre qui me paraissent dangereuses à un moment où plus que dans d'autres moments nous avons besoin de regarder le monde», a déclaré Villepin.

«Je souhaite simplement que la politique évite de rentrer dans ces ornières-là, évite de jouer avec de tels sujets, susceptibles de nourrir un débat franco-français qui ne me paraît pas sain. Soyons responsables», a-t-il lancé, précisant ironiquement avoir «oublié (son) double décimètre pour mesurer les mérites comparés des différentes civilisations».

François Bayrou, candidat du MoDem à la présidentielle, juge que les propos du ministre de l'Intérieur sont un «dangereux détournement de pensée» visant l'islam. «Au premier abord, la réflexion paraît fondée. Les civilisations humanistes qui mettent la personne humaine au centre de leurs préoccupations sont plus justes et dignes de fierté que celles, par exemple, qui acceptent l'esclavage ou pire encore les sacrifices humains», affirme Bayrou dans une interview à la Dépêche du Midi rendue publique dimanche.

Mais en fait, «ces propos sont un dangereux détournement de pensée» car, derrière ce qu'affirme Claude Guéant, «il y a autre chose: une volonté de dresser les sociétés les unes contre les autres», ajoute-t-il.

Selon le candidat centriste, «ce qui est visé, c'est l'islam. Or un dirigeant politique dans un pays comme le nôtre devrait s'interdire d'exciter les sentiments du peuple dont il a la charge contre une partie importante de l'humanité et contre des concitoyens». Il fait valoir que «notre civilisation, matérialiste, vouée à l'argent, mérite souvent elle-même la critique».

«C'est la censure à tous les étages»

Pour autant, la droite ne désarme pas et contre-attaque en masse. SeulAlain Juppé a regretté dimanche l'utilisation du terme «civilisation».

Invité de BFMTV2012/RMC/Le Point, le ministre des Affaires étrangères a fait valoir que Guéant, un «vrai républicain», avait «voulu dire que toutes les idées, tous les systèmes politiques ne se valent pas».

«Il a bien raison, nous sommes attachés à des valeurs fondamentales, d'égalité», a ajouté le ministre. «Face aux printemps arabes, j'ai marqué ma ligne rouge», à savoir le respect des principes d'égalité et de démocratie, a poursuivi Juppé.

«Je reconnais que le mot de civilisation peut prêter à confusion car il a une profondeur historique qui est assez différente (de celles des systèmes politiques, ndlr)», a dit Juppé. «Il faut éviter à tout prix le choc des civilisations. Il n'y a que le dialogue et l'échange qui peuvent être porteurs de progrès», a-t-il dit.

«Il y a des sensibilités différentes, très différentes à gauche, différentes à droite. Sur le fond il n'y a absolument aucun doute, Claude Guéant est un républicain qui partage et respecte les valeurs qui sont les miennes», a-t-il dit. Comme on lui demandait si le propos de Guéant était «maladroit», il a répondu: «Moi, je ne parlerais pas, effectivement, de choc des civilisations, car je pense que c'est inadéquat».

Mais à cette exception près, tout l'UMP défend Guéant. Le ministre du Travail Xavier Bertrand a trouvé dimanche «surprenant» que les déclarations de Claude Guéant sur les civilisations «fasse polémique».

«Tyrannie ou démocratie? Votre choix est fait, comme moi, évidemment. Civilisation de progrès plus que civilisation de régression? Vous pensez comme moi. Une civilisation qui revient en arrière alors que toute l'histoire des peuples, toute l'histoire du monde va vers le progrès, les droits de l'homme, l'émancipation de la femme. C'est surprenant que ça fasse polémique», a déclaré Bertrand, lors du Grand entretien RCJ.

Pour lui, «il faut raison garder, les choses ont été précisées par le cabinet de Claude Guéant et la phrase si on cherche à la sortir de son contexte pour faire de la polémique c'est que M. (Harlem) Désir a une idée dernière la tête».

Il a estimé que «la gauche devrait faire très attention aujourd'hui» car «l'anti sarkozysme ne fait pas un projet».

Le ministre s'est indigné des «polémiques permanentes sur ce que dit ou fait Claude Guéant» qui «sont insupportables et ne feront pas illusion chez les Français qui savent pertinemment que lorsque quelqu'un saute avec autant de gourmandise sur une polémique, comme le fait Harlem Désir, comme le fait la gauche, c'est que ça cache beaucoup de choses».

Pour le ministre de la Défense, Gérard Longuet, cette phrase «est intéressante dans son contexte». «Dire que le respect de la personne, dire que le refus de la violence, dire que le refus de la peine de mort par exemple hiérarchisent des comportements, des cultures, des civilisations me paraît d'une banalité totale», a-t-il poursuivi dimanche sur RTL. Pour lui, «si on ne peut même pas dire cela, c'est la censure à tous les étages et à tous les moments de la réflexion».

En revanche, a fait valoir Gérard Longuet, «il faut condamner le relativisme qui consiste à dire "tout s'équivaut"». «Tout ne s'équivaut pas, je crois que le respect de la personne, le respect de la femme est un devoir absolu. Or, il y a des sociétés qui ne le respectent pas, il faut savoir, il faut le dire.» Comme on lui demandait s'il s'agissait «des sociétés musulmanes notamment», il a répondu: «Pas toutes, l'islam est polymorphe dans le temps et dans l'espace et s'il y a des sectes minoritaires, il y a un islam débonnaire et bon enfant qui est tout à fait à l'image de ce qu'est le protestantisme ou le catholicisme dans d'autres parties du monde.»

Arno Klarsfeld, a estimé que le ministre de l'Intérieur disait «des choses évidentes». «Si la gauche veut faire campagne sur le fait que le racisme ou les talibans valent la civilisation française ou britannique, qu'ils le fassent», s'est agacé Le président de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (Ofii), interviewé par l'AFP. «Je préfère une civilisation qui respecte la liberté de conscience plutôt qu'une civilisation qui massacre les libertés religieuses, a-t-il poursuivi. Je préfère une civilisation où la femme a une place égale à l'homme plutôt qu'une civilisation où l'homme piétine la femme.»

Henri Guaino a demandé dimanche que l'on puisse «débatte sans hystérie». «Je suis frappé par l'hystérie permanente qui fait irruption dans tous les débats. On peut être d'accord, on peut être en désaccord (…) Si on pouvait en débattre sans hystérie, sans anathème, sans hurlement inutile, on s'en porterait mieux. M. Guéant est tout sauf un raciste!», a déclaré le conseiller spécial de Nicolas Sarkozy, invité de Dimanche + sur Canal +.

«Les civilisations sont différentes et nous avons le droit de garder notre faculté de juger», a fait valoir le conseiller spécial du chef de l'Etat, en expliquant que «dans une civilisation, il y a une hiérarchie des valeurs». Pour lui, M. Guéant a «voulu dire (qu'à) l'intérieur d'une civilisation, on a droit de trouver (quelque chose) bien ou pas bien». «La lapidation des femmes est quelque chose que nous trouvons très mal». «Nous sommes aussi une civilisation à vocation universaliste», a poursuivi Guaino, en relevant que «la plupart des gens qui hurlent (contre Guéant, ndlr) sont des universalistes qui voudraient voir leurs valeurs imposées au monde entier». Comme on lui demandait s'il établissait une hiérarchie entre les civilisations, il a répondu: «il y a des civilisations que je préfère à d'autres. Je préfère la mienne à d'autres».

Le sénateur UMP Jean-Pierre Raffarin, ancien Premier ministre, sur France Info: «Il est meilleur ministre qu'ethnologue. Ce n'est pas un ethnologue averti. Il y a là en effet quelques imprudences.» Claude Guéant est un «vrai républicain» et la gauche fait un «mauvais procès». «C'est évident que sur la politique, il peut y avoir hiérarchie», mais «sur la civilisation, la hiérarchie s'appelle l'ethnocentrisme».

Le ministre des Transports, Thierry Mariani, sur RTL, soutient M. Guéant «à 100%». «Je crois qu'il n'a pas établi de hiérarchie, il dit simplement que toutes les civilisations ne se valent pas». «Je ne mets aucune civilisation inférieure ou supérieure, cela veut dire qu'il y a des valeurs différentes.»

Pour le président de l'Uni, Olivier Vial, interrogé par l'AFP, «ce discours très général, très serein, posé et républicain a été prononcé dans une configuration de colloque, pas de meeting. Il n'avait aucune vocation à être polémique, ce n'était pas une harangue». «D'une bonne demi-heure, il a été très bien reçu» par les 300 cadres de l'Uni présents, étudiants et professeurs, «la petite phrase a été totalement sortie de son contexte», a-t-il ajouté. Claude Guéant ayant «insisté sur les valeurs de liberté, d'égalité et de fraternité, c'est un discours dans lequel tous les Français se reconnaissent», a encore commenté Olivier Vial. «En effet, on peut dire qu'il y a des civilisations différentes à nos yeux. On peut considérer que la civilisation des talibans, ce n'est pas comme la civilisation française, il n'y a rien de choquant», a-t-il ajouté à titre personnel.

Charles Beigbeder, qui vise la 8e circonscription de Paris, a réagi sur Twitter.

Guéant et sa politique sur l'immigration très inspirée du FN, comme Beigbeder, ne sont pas les seuls à l'UMP à multiplier les sorties destinées à flatter l'électorat FN. Brigitte Barèges, députée de la droite populaire, avait ainsi vanté le 14 janvier la préférence nationale. Elle avait déjà provoqué un tollé après le choix du PS d'autoriser le mariage homosexuel: «Et pourquoi pas des unions avec des animaux?»

Une chose est sûre: la droite de gouvernement s'est visiblement sentie chez elle à la réunion de l'UNI. A commencer par un vieux routier de la droite décomplexée, Eric Raoult, responsable de l'UNI Paris I et Paris Assas en 1979. Tristan Maupoil, rédacteur en chef de Fréquence ESJ, rapporte ses propos sur son fil twitter:

Une sortie fidèle à ce syndicat, dont les tracts tout en nuances, à l'image de celui-ci, sorti à l'occasion du débat sur le vote des étrangers aux élections municipales qui avait enflammé le Sénat en décembre...

 

La thématique de la civilisation a toujours été l'un des sujets fétiches du FN. Ainsi, le 12 mars 2007, Jean-Marie Le Pen, en meeting à Lyon,justifiant le tryptique "travail-famille-patrie" cher à Pétain, l'ex-leader de l'extrême droite avait assuré qu'il fallait mener un «combat immémorial de la civilisation contre les barbares. La sécurité intérieure doit devenir une priorité, car la menace pourrait, demain, être intérieure».