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lundi 25 juin 2012

Le Qatar réoriente son fonds banlieue de 50 millions d'euros vers les PME



Le Monde, 25 juin 2012

Doha (Qatar) Envoyé spécial
L'émirat avait suscité des critiques en voulant financer des entrepreneurs des banlieues. Les fonds seront finalement alloués par le gouvernement




C'est le premier ajustement dans la relation Paris-Doha depuis l'élection de François Hollande. Le fonds de 50 millions d'euros destiné aux entrepreneurs de banlieue, dont le Qatar avait annoncé la création à la fin de l'année 2011 et qui avait suscité une controverse au sein de la classe politique française, est réorienté pour servir les PME. Plutôt que de choisir par lui-même les bénéficiaires de ses largesses, le minuscule mais richissime émirat piochera dans un éventail de projets sélectionnés par le gouvernement.

" Le fonds est à la disposition des autorités françaises ", résume-t-on dans l'entourage du premier ministre qatari, Hamad Ben Jassem Al-Thani, qui s'est entretenu sur le sujet avec François Hollande, lors de sa venue à l'Elysée, au début du mois. Les ministères directement concernés par cette nouvelle approche sont ceux du redressement industriel et du logement, pilotés respectivement par Arnaud Montebourg et Cécile Duflot. " On veut dissiper les arrière-pensées ", ajoute la source, en référence aux critiques que l'initiative de Doha avait générées.

Les plus outrancières étaient venues de Marine Le Pen, qui avait stigmatisé une démarche visant à développer " le fondamentalisme musulman ". Mais, en coulisses, des élus et des fonctionnaires s'étaient émus de ce qu'ils percevaient comme une forme d'ingérence dans un domaine réservé de l'Etat, à savoir la politique de la ville. Survenant dans la foulée du spectaculaire rachat du PSG par la micro-monarchie, ainsi que de son entrée au capital de fleurons de l'industrie hexagonale, comme Lagardère et Veolia, l'opération banlieues semblait confirmer le préjugé qui veut que le " Qatar rachète la France ".

Choqué par ces résistances qu'il n'avait pas anticipées, le Petit Poucet de la péninsule arabique prit prétexte de la campagne présidentielle pour suspendre et repenser son projet. Officiellement, image oblige, il n'est pas question de parler de revirement ou d'abandon. Le pays, qui dispose d'un des PIB par habitant les plus élevés de la planète (102 000 dollars), ne goûte guère de faire machine arrière. L'émir Hamad Ben Khalifa Al-Thani aurait toujours réfléchi en termes de PME, et non de banlieues, insiste-t-on dans les milieux dirigeants. Y aurait-il eu un malentendu, une erreur de perception ?

L'argumentaire risque de ne pas convaincre les responsables de l'Association nationale des élus locaux pour la diversité (Aneld). C'est elle qui est à l'origine du fonds, une idée qu'elle était allée " vendre " au souverain qatari en personne, lors d'un voyage à Doha. Interrogé par l'AFP, son président, Kamel Hamza, a estimé que la nouvelle formule s'apparente à un " hold-up, un détournement de fonds par le gouvernement "" On va lancer une pétition nationale pour demander que ce fonds revienne dans le giron de la banlieue, a-t-il ajouté. Une lettre et cette pétition seront envoyées à Hollande. "

Du côté du Qatar, on s'efforce de calmer le jeu. On fait valoir que, si les projets de l'Aneld répondent aux attentes de l'émirat et qu'ils soient en même temps validés par le gouvernement français, ils pourront bénéficier du fonds. " Le critère déterminant, ce n'est pas la localisation du projet, mais sa qualité ", assure un bon connaisseur du dossier.

Benjamin Barthe

© Le Monde

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