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vendredi 23 août 2013

Cambadélis : "L'habileté politique de François Hollande ne suffit pas" 23.08.2013 à 13:23 | LE MONDE Françoise Fressoz et Bastien Bonnefous

Jean-Christophe Cambadélis, député de Paris, au siège du Parti socialiste, le 21 août. JEROME SESSINI/MAGNUM PHOTOS

Alors que les socialistes tiennent leur université d'été du 23 au 25 août à La Rochelle, Jean-Christophe Cambadélis, député de Paris et ancien candidat au poste de premier secrétaire, souhaite que le Parti socialiste retrouve"une place centrale dans le dispositif politique".

Partagez-vous l'optimisme de François Hollande ? La croissance est-elle de retour ou s'agit-il seulement d'une ruse pour combattre le pessimisme ?

Jean-Christophe Cambadélis Les derniers indicateurs sur la croissance donnent raison au président de la République. Son volontarisme économique n'est donc pas contestable. Pour autant, la France n'est pas tirée d'affaire parce que l'ensemble de l'Europe ne l'est pas et parce que nos déficits mettront du temps à être surmontés. C'est pourquoi l'habileté politique de François Hollande ne suffit pas. Il faut qu'il donne un cap à la France. Notre pays a vocation à retrouver la première place en Europe. Ce doit être l'objectif du quinquennat.

Que voulez-vous dire ?

Nous devons gagner en inventivité, en créativité, en impulsion, redonner au pays la position centrale qu'il occupait sous François Mitterrand et qu'il a perdue au cours des présidences Chirac et Sarkozy.

Mais n'y a-t-il pas un doute sur les choix économiques de François Hollande qui s'exprime à l'intérieur même du PS ?

La situation est objectivement très difficile parce que nous devons à la fois muscler notre industrie, réduire nos déficits et ne pas casser la croissance. La passe est étroite et je trouve étonnant que tous les jours les socialistes ajoutent aux difficultés en provoquant des débats qui n'ont pas lieu d'être sur les retraites, la pression fiscale ou l'immigration. Je leur conseille de parler à bon escient, de ne parler des problèmes qu'au moment où ils se posent sans trop chercher à anticiper.

D'où vient le malaise ?

Le Parti socialiste se cherche. Il a besoin d'une ligne, d'une énergie créatrice. Il doit retrouver une place centrale dans le dispositif politique. J'avoue ma très grande perplexité quand je vois le gouvernement organiser un séminaire pour réfléchir à la France de 2025. Que reste-t-il au PS ? Ce devrait être le rôle du parti d'imaginer la nouvelle France, l'égalité réelle, la liberté ordonnée, la fraternité laïque, et de construire face à la lepénisation rampante de la droite et de la société l'alliance des progressistes.

Harlem Désir ne "fait pas l'affaire" ?

Sa situation n'est pas facile, mais après l'automne social va s'ouvrir le printemps électoral. Il faut que nous retrouvions vite le Harlem Désir qui fit les beaux jours de SOS Racisme. Nous n'attendons pas de lui qu'il soit le porte-parole du gouvernement. L'excellent chef d'orchestre Jean-Marc Ayrault devrait pouvoir s'en passer. Nous avons besoin d'un leader d'opinion capable de s'ouvrir à tous les talents et de mobiliser les grands élus, y compris à la gauche du parti.

Vous redoutez le combat municipal de mars 2014 ?

J'appelle à la mobilisation car il y a danger. En trente ans, la gauche a réussi à bâtir un modèle municipal unitaire, intégratif, écologique et culturel. Depuis 1977, c'est ainsi qu'elle s'est construite, dans l'unité de base de ses bastions municipaux. Or, aujourd'hui, le Front national est à l'offensive contre ce modèle qui fait obstacle à sa propre idéologie.

Anticipez-vous une poussée lepéniste ?

Je redoute, à la faveur de la crise, une irruption dans les urnes du national-populisme, et j'appelle toutes les composantes de la gauche à l'union pour faire barrage.

Cela s'adresse-t-il aussi à Jean-Luc Mélenchon, qui ne cesse d'agresser François Hollande ?

Oui, car si les municipales n'ont pas d'impact sur la politique nationale, elles sont en revanche un enjeu pour le FN. Il faut que la gauche soit unie dans cette confrontation. Si nous n'y prenons garde, nous allons vers des années frontistes, une tension civile extrêmement dure qui compromettra le développement économique du pays.

Ne dramatisez-vous pas un peu trop ?

Des digues sont tombées pendant la campagne présidentielle : pour des raisons électorales, Nicolas Sarkozy a joué la proximité avec le FN. Aujourd'hui, une partie de la droite est fascinée par Marine Le Pen et ses thèses progressent dans l'opinion. Il faut reconstituer les digues et mener le combat sur les valeurs en prenant le FN pour ce qu'il est : une formation politique qui veut remettre en cause le pacte républicain, qui a la hantise du métissage et qui développe la haine de l'islam, après avoir développé celle du juif et de l'Arabe.

Manuel Valls s'est-il trop droitisé comme le pense une partie de la gauche ?

Je comprends les critiques de Cécile Duflot à son encontre mais il faut juger les ministres sur ce qu'ils font, pas simplement sur ce qu'ils disent. Au ministère de l'intérieur, Manuel Valls a organisé la rupture avec les années Sarkozy. Il a rompu avec les pratiques douteuses, dissocié la sécurité des questions ethniques. Il se revendique d'une autorité républicaine à la Clemenceau, sa laïcité n'est pas l'ennemie des religions. La question pour la gauche n'est pas le débat avec Manuel Valls, mais le combat contre la lepénisation rampante.

Le PS est-il prêt à la bataille ?

Pour l'instant, chacun agit dans sa ville. Il manque un élan national.

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