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jeudi 5 février 2015

La République doit agir pour constituer un islam de France Le Monde.fr | 05.02.2015 à 12h52


 Après le choc des assassinats des 7, 8 et 9 janvier, après la communion républicaine du 11 janvier, les premières réponses sont sécuritaires. Mais il faut aller au-delà, car on a trop tardé dans la construction de l'islam de France.

Tout le monde aujourd'hui réclame des « imams républicains ». Des progrès ont été réalisés : certains sont formés en France. Ceux qui viennent de l'étranger reçoivent des formations à la laïcité et à la culture française. Mais le plus simple serait quand même de les former à l'université de la République !

Impossible, dit-on, la religion et l'Etat sont séparés en France. C'est vrai. Sauf en Alsace-Moselle, grâce au régime concordataire. Là-bas, les prêtres, les pasteurs, les rabbins sont formés et rétribués par l'Etat. Il y a dix ans, les autorités protestantes avaient proposé que ces possibilités soient étendues aux musulmans. Mais rien n'a abouti.

Apprentissage de l'arabe satisfaite par les mosquées

Deuxième exemple, l'enseignement de l'arabe. La France dispose d'un corps d'enseignants d'arabe de grande qualité dont les classes sont souvent presque vides. L'éducation nationale considérait qu'il ne fallait pas que ces jeunes Français d'origine étrangère apprennent la langue de leurs parents : c'était un obstacle à leur intégration. Mais l'acculturation n'est pas la solution. L'importante demande d'apprentissage de l'arabe est pour le moment satisfaite par les mosquées. Pourquoi la République envoie-t-elle ses enfants dans les mosquées ?

Troisième exemple, le financement du culte. Venus pour leur grande majorité comme ouvriers et manœuvres en France, les immigrés du Maghreb, de Turquie et d'Afrique subsaharienne ont connu le destin social des enfants d'ouvriers : pas très gratifiant. Et, même si à niveau social égal, ils réussissent mieux que leurs petits camarades français de plus longue extraction, ils restent pauvres. Et sont incapables de participer significativement à l'effort d'équipement.

Il serait pourtant possible de lever l'argent dans les boucheries, les abattoirs et dans les grandes surfaces : le marché du halal représenterait en France plus de 5 milliards d'euros. Les querelles internes aux musulmans de France, des circuits financiers pas très transparents et des intérêts étrangers puissants ont bloqué jusque-là cette initiative. Il est temps de trouver une solution.

Repenser le Conseil français du culte musulman

Quatrième exemple, l'organisation de l'islam de France. Le Conseil français du culte musulman (CFCM) reste dépendant des pays d'origine des Français de confession musulmane. Mais l'efficacité de cette organisation est aujourd'hui remise en cause par la démographie : ces Français ne sont plus majoritairement des immigrés de première génération, mais plutôt leurs enfants et leurs petits-enfants. Des mosquées trop liées à un Etat, des imams dont la culture est à l'évidence étrangère, des conflits externes à l'islam de France qui compliquent les relations ont affaibli l'autorité du CFCM, qu'il va falloir repenser.

La très grande majorité des enfants d'immigrés deviennent des Français comme les autres, ce que l'on mesure très bien par les mariages mixtes, la hausse de leur niveau éducatif, leur progression professionnelle, malgré les discriminations, comme l'indique une enquête de l'Institut national d'études démographiques.

L'occultation de cette réalité est dommageable pour tous. Car les descendants d'immigrés ont besoin d'exemples positifs et le grand public de preuves qu'il n'y a pas de fatalité ethnique ou religieuse à la non-intégration.

Karim ElKaroui (fondateur du club XXIe siècle pour la promotion de la diversité)

Hakim El Karoui a été conseiller à Matignon de Jean-Pierre Raffarin. Il a également présidé l'Institut des cultures d'islam.


En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/02/05/la-republique-doit-agir-pour-constituer-un-islam-de-france_4570654_3232.html#ATeByb10jx1P3bXk.99

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